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CHAPITRE 2
21/08/2006 08:55
EN LIGNE : TOM GRANT, DÉTECTIVE PRIVÉ ENGAGÉ PAR COURTNEY LOVE POUR RETROUVER KURT COBAIN
AVANT MON INTERVENTION DANS L'AFFAIRE...
Pendant les semaines qui ont précédé la mort de Kurt, il a été question de leur divorce. Courtney a appelé l'un de ses avocats, Rosemary Carrol, et lui a demandé d'engager l'avocat spécialisé dans les procédures de divorce le plus sadique et vicieux qu'elle trouverait. Elle s'est informée sur les possibilités d'annulation de son contrat de mariage. Kurt aussi a appelé Rosemary. Il n'avait pas terminé son testament et désirait en exclure Courtney. Kurt ne voulait plus se produire en tournée ou en concert. Il se désinteressait d'un contrat de neuf millions de dollars et demi : la tournée de Lollapalooza. Courtney était en colère contre Kurt en raison ce manque à gagner. Son irritation ne trouvant pas d'écho, elle a commencé à reprocher à Kurt sa dépendance à la drogue. Elle a organisé une réunion dans le style amour-vache avec d'autres intervenants, certains se trouvant être les camarades intoxiqués de Kurt. Courtney déclare avoir dit à Kurt : "Arrête tout ça, il faut que tu sois un bon père !". Cette remarque peut paraître quelque peu déplacée, venant d'une femme que j'ai vue sous l'emprise de la drogue la première fois que nous nous sommes rencontrés, et qui n'a pas décroché pendant les huit mois suivants. Il est difficile de croire que Kurt ait pris cette scène de ménage au sérieux.
26 mars 1994
Courtney quitte Seattle pour l'hôtel Peninsula, à Beverly Hills.
30 mars
Kurt et son meilleur ami, Dylan Carlson, achètent un fusil. Kurt dit à Dylan qu'il redoute des intrusions chez lui. Abandonner la tournée de Lollapazoola est une décision qui coûtera beaucoup d'argent à d'autres personnes. Kurt pense alors que sa vie serait en danger s'il ne donnait pas les concerts. Le fusil est un calibre 20 prévu pour de petites munitions, une arme souvent conseillée par les vendeurs pour la protection de la maison. Les balles ne traversent pas les murs et ne mettent pas en danger les gens de l'autre côté. Kurt apporte le fusil chez lui, afin de l'avoir sous la main quand il reviendra de sa cure de désintoxication. Puis, il quitte Seattle pour Marina Del Rey, en Californie.
1er avril
Treize appels téléphoniques sont passés de la chambre d'hôtel de Courtney, au Peninsula, à Cobain, la plupart d'entre eux en P.C.V. Courtney m'avouera plus tard n'avoir parlé à Kurt qu'une seule fois ce jour-là. Dans la soirée, Kurt quitte sa résidence. A 8 h 47, il appelle l'hôtel Peninsula et laisse un message pour Courtney : "Le numéro de téléphone d'Élisabeth est le (213) xxx xx xx (ce numéro se trouve dans mon dossier). Courtney n'a jamais parlé de ce message dans les média. Il n'a pas l'air de d'émaner d'une personne suicidaire. Kurt arrive à Seattle tôt le samedi 2 avril, et un taxi le conduit à sa maison de Lake Washington. Plus tard dans la matinée, Michael De Witt, surnommé Cali, qui fait office de "nounou" et qui vit chez le couple, le voit entrer dans sa chambre et ils discutent brièvement. Cali déclara plus tard avoir informé Courtney de la présence de Kurt dans la maison. Le samedi soir, un ami de Courtney monte de toutes pièces une information relayée par Associated Press, selon laquelle Courtney se trouverait à l'hôpital, victime d'une overdose. Ce mensonge m'apparaîtra plus tard comme faisant partie d'une véritable machination.
J'INTERVIENS...
Dimanche 3 avril
Une femme téléphone à mon bureau de Beverly Hills. Elle me dit s'appeler Courtney Love. Quelqu'un s'est servi de la carte de crédit de son mari. Elle veut que je découvre son identité. Accompagné d'un autre enquêteur, Ben Klugman, je rencontre Courtney à l'hôtel Peninsula, à Beverly Hills. - S'il y a des fuites dans la presse, je vous poursuis en justice, me prévient Courtney dès que nous pénétrons dans la chambre. "Enchanté de vous rencontrer !" pensé-je. Courtney nous dit que son mari est Kurt Cobain, et qu'il vient de disparaître de son centre de désintoxication. Elle nous raconte qu'au prix d'un mensonge, elle a fait résilier la carte de crédit de Cobain. Elle veut que nous appellions la banque pour découvrir quelles opérations bancaires ont été effectuées sur son compte. Je lui réponds que je ne comprends pas pourquoi elle a besoin de nous pour ça. Elle peut le faire elle-même et économiser de l'argent. Si nous le faisions pour elle, je lui facturerais cinquante dollars juste pour passer un coup de fil. Courtney réplique ironiquement : - Et alors, ça n'est pas assez ? Il est temps pour nous de faire plus ample connaissance : - Écoutez, je ferai ce que je peux pour vous aider, mais je ne resterai pas ici pour me faire engueuler à chaque fois que j'ouvre la bouche. Courtney s'excuse et poursuit : Kurt a une seule carte de crédit, sans laquelle il n'a aucun moyen de se procurer de l'argent. Il n'aurait même pas d'amis susceptibles de lui en prêter. Vu à qui nous avons affaire, c'est proprement incroyable ! Nous interrogeons Courtney sur les possibilités de Kurt de se procurer de l'argent. Elle insiste : - Ce type ne peut même pas attraper un foutu taxi tout seul ! Elle nous raconte son coup monté, cette histoire d'overdose relayée par Associated Press la veille au soir. Elle dit avoir fait cela pour que Kurt la contacte. Plus tard, Courtney fait allusion aux neuf millions de dollars et demi que Kurt a laissés s'échapper. - S'il ne le fait pas pour l'argent, qu'il le fasse pour notre enfant, Frances. S'il ne fait pas la tournée, je la ferai à sa place. Elle avoue penser que Kurt veut divorcer, mentionne son contrat de mariage en précisant que tous les biens et les maisons sont au nom de son mari. Elle ne sait pas où le trouver. Peut-être, d'après elle, est-il à Seattle, ou dans l'Est avec son ami Michael Stipes. Elle nous demande alors de trouver quelqu'un à Seattle pour surveiller l'appartement d'un certain dealer, et d'autres endroits, au cas où Kurt reviendrait, mais ne dit rien au sujet de leur maison de Lake Washington. J'ai donc embauché quelques détectives privés de Seattle pour assurer la surveillance des environs.
UN FAUX RAPPORT DE POLICE
Lundi 4 avril
Courtney appelle la police pour signaler une disparition en prétendant être la mère de Kurt, Wendy O'Conner. Le rapport stipule : "M. Cobain s'est enfui d'un centre de désintoxication en Californie et a pris l'avion pour Seattle. Il a aussi acheté un fusil et présente des tendances suicidaires". L'énoncé de ce rapport laisse entendre que Kurt a acheté le fusil après son départ de Los Angeles. Il ne mentionne pas non plus le fait que Kurt a été vu à Lake Washington depuis sa disparition ! Nous continuons de travailler avec la banque. Quelqu'un essaye d'utiliser la carte de crédit depuis son annulation. Courtney nous a dit que Kurt séjourne toujours dans les meilleurs hôtels. En réalité, nous apprendrons plus tard qu'il préfére les bouis-bouis. Nous téléphonons aux hôtels en essayant de localiser Kurt sous un de ses pseudonymes habituels. Courtney ne veut pas que Kurt sache qu'elle le recherche. Lors d'une conversation téléphonique, elle me dit que Kurt est suicidaire : "Tout le monde pense qu'il va mourir".
Mercredi 6 avril
Kurt n'a pas été localisé. Courtney téléphone aux électriciens chargés de l'installation d'un système de surveillance et de sécurité à Lake Washington, et leur demande de commencer à travailler sur l'éclairage et l'alarme dans la serre. Sait-elle que Kurt s'y trouve ? Essaye-t-elle de les mettre sur la piste du corps ? Plus tard, à l'hôtel, je propose d'aller à Seattle afin de rechercher Kurt. Une personne dans la pièce lance : - Pourquoi tu n'y vas pas, Courtney ? Elle répond : - Je ne peux pas, j'ai du boulot ici. Rosemary, son avocate, me confiera ultérieurement que la chanteuse n'avait aucun engagement qui puisse la retenir à Los Angeles. Je demande alors à Courtney de ne révéler à personne ma présence à Seattle, mais elle en parlera tout de même à Michael De Witt (Cali). Pourtant, elle m'a dit n'avoir aucune confiance en Cali. "Sauvez l'idole de l'Amérique, Tom !" s'exclame Courtney quand je quitte la chambre d'hôtel pour l'aéroport.
RECHERCHES À SEATTLE
Mercredi 6 avril, 23 h 30
Je prends le meilleur ami de Kurt, Dylan Carlson, à son appartement. Nous allons déjeuner et planifier notre stratégie pour retrouver Kurt et comprendre ce qui se passe. Dylan me dit que Kurt redoute les intrusions dans sa maison, et qu'il l'a aidé à acheter le fusil pour assurer sa protection. Plus tard, nous vérifions l'appartement du dealer de Kurt, à Capitol Hills, ainsi que les hôtels où il est arrivé à Cobain de résider. Pendant que Dylan et moi tournons en voiture autour de Seattle, je lui demande si nous ne devrions pas rencontrer la mère de Kurt, à Aberdeen. Il me répond : "Non, Kurt ne peut pas être là-bas. Il n'est plus en rapport avec sa mère".
Jeudi 7 avril, 2 h 15 du matin
Nous nous rendons à la maison de Lake Washington. J'attends dans la voiture pendant que Dylan fait un tour extérieur, seul, ainsi que nous l'avons prévu. Nous ne voulons pas que ma présence puisse inquiéter Kurt. Dylan revient à la voiture au moins cinq minutes plus tard pour me dire qu'il semble n'y avoir personne à l'intérieur. Je me demande pourquoi il lui a fallu autant de temps si il n'y avait vraiment personne dans la maison. Nous appelons Courtney d'une cabine téléphonique. Elle est chez Rosemary Carroll, à Los Angeles. Je lui demande de contacter la compagnie de surveillance afin de déconnecter l'alarme pour que nous puissions entrer dans la maison. De retour à la maison, nous y pénétrons par une fenêtre ouverte de la cuisine. Pendant que nous fouillons, Dylan me dit qu'il n'a jamais vu cette maison aussi propre auparavant. Nous ne trouvons pas Kurt. Dylan ne me parle pas de la serre et comme il fait sombre, je ne remarque pas la pièce au-dessus du garage. Aujourd'hui, nous savons qu'après avoir parlé à Dylan au téléphone, Courtney a quitté Rosemary pour se rendre à l'hôtel Peninsula. Un peu plus tard, elle appelle les urgences. Les premiers rapports montrent qu'elle a de nouveau fait une overdose. D'après Rosemary Carroll, Courtney a monté tout cela de toute pièce. Elle me dit aussi avoir surpris dans la conversation téléphonique de Courtney avec Dylan les mots : "Sois en sûr et vérifie la serre". Dylan et moi passons l'essentiel de la journée à inspecter les lieux où Kurt a l'habitude de traîner, et à parler à tous ceux qui pourraient savoir où il se trouve. Le soir, nous nous dirigeons vers la petite ville de Carnation, à cinquante kilomètres à l'est de Seattle, où les Cobain possèdent deux bungalows plantés sur un vaste terrain. Mais dans la pénombre, Dylan ne pense pas pouvoir localiser la propriété. La pluie battante nous incite à faire demi-tour. Nous essaierons une autre fois. Bien que Courtney se trouve à l'hôpital à cause de sa prétendue "overdose", Dylan s'arrange pour obtenir de sa part des instructions supplémentaires. Elle veut que nous retournions à la maison de Lake Washington chercher le fusil. Elle pense qu'il se trouve caché dans un compartiment de la penderie. Je me demande alors pourquoi elle n'a pas demandé ça à Cali plus tôt...
Jeudi 7 avril, 21 h 45
Dylan et moi retournons à la maison de Lake Washington. A l'intérieur, je trouve sur l'escalier principal une note signée de Cali. Elle n'y était pas la veille au soir et dit notamment : "Kurt, je ne peux pas croire que tu sois passé à la maison sans me prévenir. Tu es un sacré trou du cul de ne pas appeler Courtney". J'ai l'impression que cette note m'est destinée, plutôt qu'à Kurt ! Ce bazar ressemble à un coup monté. Cali nous dira plus tard que depuis lundi, il était rarement chez lui. Pourquoi avait-il du mal à croire que Kurt soit passé ? D'ailleurs, c'était la maison de Kurt ! Qui donnait à Cali le droit d'être en colère parce que Kurt était passé chez lui ? C'est insensé ! Cali nous explique qu'il n'était pas resté dans la maison parce que Courtney pensait que Kurt s'y trouvait. Dans ce cas, pourquoi ne nous a-t-elle pas demandé de surveiller la maison ? Cali a annoncé à des amis qu'il partait pour Los Angeles dans l'après-midi du 7 avril. Je n'arriverai donc pas à le voir ou à lui parler pendant que je suis à Seattle. J'ai l'impression qu'il cherche à m'éviter.
KURT EST RETROUVÉ
Vendredi 8 avril au matin
Dylan et moi sommes de nouveau sur la route de la propriété de Carnation quand nous nous arrêtons pour faire le plein d'essence. Dylan passe un coup de fil. Quand il revient à la voiture, il me dit qu'un ami vient de lui annoncer qu'on a trouvé un corps dans la maison de Lake Washington. Il s'agit de Kurt. Aucune réaction de Dylan. Plus tard, nous apprenons que le corps de Kurt a été retrouvé dans la serre. Je me tourne vers Dylan et lui demande : "Quelle serre ?" Il me répond que c'est une pièce au-dessus du garage. Je lui demande pourquoi nous n'avons pas fouillé cette pièce et Dylan explique : - C'est juste une chambre minable. Je pensais qu'ils ne s'en servaient que de débarras". J'appelle mon bureau pour parler à, mon collaborateur, Ben Klugman. La compagnie de la carte de crédit lui a dit que quelqu'un continuait à se servir de la carte de Kurt quelques heures encore avant la découverte du corps. Or, nous savons maintenant que Kurt était mort depuis deux jours au moins quand son corps a été découvert. Qui a donc utilisé sa carte de crédit après sa mort ? J'appelle les inspecteurs de la police criminelle de Seattle pour leur dire que quelque chose cloche. D'après les inspecteurs, Kurt s'est enfermé dans la chambre. La porte était fermée de l'intérieur et les pompiers ont dû briser une fenêtre pour entrer, ce qui suppose que Kurt était seul au moment de sa mort. Je pense qu'ils savent de quoi ils parlent, mais je suis curieux de savoir de quel genre de serrure il s'agissait. Courtney n'est du pas du tout énervée par le fait que d'autres que nous ont trouvé Kurt. Elle se comporte comme si elle pensait que Kurt est mort la veille. Si c'était le cas, nous aurions pu le sauver ! Pourquoi n'est-elle pas en colère contre nous ? Elle veut que je parle à la presse. Je réponds que je ne refuse de faire toute une déclaration avant d'en savoir plus sur les circonstances du décès. Tout cela me paraît si fumeux... Je quitte Seattle et prends l'avion pour retourner à Los Angeles.
LES CONSTATATIONS DE LA POLICE DE SEATTLE
Les paragraphes suivants sont des extraits, repris mot pour mot, des rapports de police de Seattle concernant la mort de Kurt Cobain. Les marques === indiquent un mot ou groupe de mots que la police a censurés avant de diffuser ses rapports. Les marques *** indiquent des éléments confidentiels (adresses, numéros de téléphone...).
Constat de disparition de personne (daté du 4 avril 94. Rapport # 94-149669)
M. Cobain s'est enfui du centre de désintoxication de Californie et a pris l'avion pour rentrer à Seattle. Il a aussi acheté un fusil et s'apprête alors à se suicider. M. Cobain peut se trouver à ===, où il peut se procurer des narcotiques. Le détective Terry, de la brigade des stupéfiants détient des informations supplémentaires."
MON COMMENTAIRE
Courtney Love a fait sa déclaration en se faisant passer pour la mère de Kurt, Wendy O'Conner. Dans le rapport, il n'est pas mentionné que Kurt a été vu pour la dernière fois à la résidence de Lake Washington. Le récit laisse entendre que Kurt s'est enfui du centre de désintoxication, puis a acheté un fusil dont il pourrait faire usage pour se tuer. En fait, Kurt a acheté le fusil pour sa protection, et avant son départ pour la clinique de Los Angeles. Donc, ce rapport met la police dans un état d'esprit bien préparé : un corps, un fusil et une note manuscrite. Tout semble coller...
ENQUETE SUR LA MORT DE COBAIN
Rapport des détectives Jim Yoshida et Steve Kirkland
8 avril 94, 9 h 50 - Le lieutenant Marberg reçoit un coup de téléphone de SPD Communications. Ils réclament une équipe de la criminelle à *** Lake Washington, boulevard E. C'est un suicide. Il y a une note sur les lieux ainsi que le fusil. La victime est Kurt Cobain..."
8 avril 94, 10 h 15 - Les détectives arrivent sur les lieux et rencontrent l'officier Joe Fewel, sergent responsable du secteur. Sur les lieux se trouvent aussi l'officier Von Levandowski, le sergent Jeff Getchman et le lieutenant Ziminsky. L'officier Levandowski rédigera le premier rapport sur l'incident, il a lui-même photographié les lieux. L'officier Levandowski déclare que le témoin === (l'électricien) est allé effectuer des travaux électriques, et a remarqué la victime étendue sur le sol de la serre, au-dessus du garage. L'officier Levandowski dit que deux services ont répondu à l'appel des urgences. Les pompiers ont brisé le carreau d'une porte vitrée pour accéder à la scène, et ont constaté que la victime était manifestement morte... L'officier Levandowski a protégé les lieux, et a attendu les directives de ses supérieurs de la Criminelle. Il connaissait la victime et était déjà venu chez elle. Il savait que la victime s'était enfuie d'un centre de désintoxication à Los Angeles, et que sa famille avait déposé un avis de disparition. La famille pensait que la victime était suicidaire. On savait enfin que Cobain avait récemment acheté un fusil. Cobain se trouvait dans la serre, une pièce de 6 mètres sur 7, au-dessus du garage. Du côté ouest, se trouvent des escaliers qui mènent à une porte vitrée. D'autres portes vitrées, du côté est, donnent sur un balcon. Ces portes ne sont pas verrouillées, mais bloquées par un tabouret sur lequel est posée une caisse à outils de jardinage. Il y a un évier sur le mur ouest, des étagères en inox sur les murs sud et nord. Une des étagère contient des bulbes de plantes dans un tas de terre. Sur celui-ci se trouve une note écrite à l'encre rouge. C'est une note à l'intention de Courtney et ===, signée Kurt Cobain. La victime est allongée sur le dos, la tête vers l'est et les pieds vers l'ouest. Il y a une grande flaque de sang séché à gauche de la victime, et une blessure ouverte au crâne. Il y a un fusil Remington M-11, calibre 20, entre les pieds de la victime. La bouche du fusil est dirigée vers la tête de la victime, dont la main gauche tient le canon. Le fusil est renversé, la gâchette et le chargeur pointent vers le haut. Le canon du fusil arrive à la ceinture de la victime. Il y a une boîte de cartouches de calibre 20, ouverte, posée sur une veste de velours beige qui recouvre un étui à fusil de Nylon beige. Tout ceci se trouve à gauche de la victime, sous le rayonnage en inox. De nombreux mégots de cigarette jonchent le sol près d'une canette de soda Barqs aux trois quarts pleine. Le portefeuille de Cobain est ouvert, son permis de conduire en évidence. L'officier Levandowski l'a consulté pour vérifier l'identité de la victime. Il y a aussi cent-vingt dollars en liquide sur le sol, à droite de la victime, ainsi qu'une boîte à cigares. Cette dernière contient tout l'attirail du toxicomane (seringues hypodermiques, cuillères brûlées, coton et petits morceaux de goudron). Il y a un sac en papier marron qui contient vingt-deux cartouches de calibre 22. Ce sac est sur le sol, aux pieds de la victime. Du côté droit, à côté de la boîte à cigares, se trouvent un chapeau, deux serviettes, les cent-vingt dollars en liquide, le portefeuille, un paquet de cigarettes, un briquet et une paire de lunettes de soleil. Dans la poche de la veste, il y a un reçu pour l'achat d'un fusil Remington de calibre 20, numéro de série 1088925. Le prix d'achat est 308,37 dollars et le reçu est daté du 30 mars 94. L'acheteur mentionné comme étant Dylan R. Carlson ===, Seattle 98115.
11 h 05 : L'enquêteur Dave Delgado, les médecins légistes Nick Hartshorne et Donald Reay, du Comté de King, arrivent sur les lieux. Le docteur Hartshorne mènera la première inspection du corps : il prend des photos puis commence son examen sur les lieux. Le fusil est ôté d'entre les pieds de la victime et déchargé par le détective Kirkland. Il reste une balle dans la chambre du fusil, et une autre dans le chargeur. Le docteur Hartshorne déclare que les dégâts à l'intérieur de la cavité buccale indiquent que le coup a été tiré dans la bouche. Il remarque des traces de piqûres à l'intérieur des avant-bras droit et gauche.
MON COMMENTAIRE
1 - La police possédait donc des photographies de la scène du meurtre. Ils auraient pu me les montrer, plus tard, pour clarifier toutes les questions qui se poseront, on le verra plus loin, sur la coiffure de Kurt, mais le sergent Cameron m'a dit qu'ils n'avaient pas développé les photos et ne le feraient probablement jamais.
2 - Les portes vitrées du côté ouest étaient fermées à clef. La police pense donc que Cobain s'était enfermé à l'intérieur, ce qui accrédite la thèse d'un suicide. Soit, mais il faut savoir que les serrures de ces portes sont du même modèle que celles qu'on trouve dans les hôtels. En poussant un bouton qui se trouve sur la poignée, vous verrouillez la porte. Cependant, rien ne vous empêche de faire cette manoeuvre avant de sortir en claquant la porte derrière vous. La porte paraîtra avoir été verrouillée de l'intérieur. N'importe qui peut avoir procédé de cette manière. (À l'appui de ma théorie, j'ai conservé des photos des portes).
3 - Le premier officier sur les lieux a trouvé le portefeuille sur le sol et a pris des clichés du permis de conduire. Mais c'est lui qui a ouvert le portefeuille.
4 - Il n'y avait pas de tabouret bloqué contre la porte. Kurt n'était pas barricadé dans la pièce. Le seul tabouret se trouvait devant les autres baies vitrées, du côté est, celles qui mènent au balcon. Ce n'était pas une issue. Ce petit tabouret en bois ne bloquait rien du tout.
5 - La police se réfère à la note trouvée sur les lieux comme une note de "suicide", dit qu'elle a été écrite à l'intention de Frances et Courtney, pour expliquer "pourquoi il s'était tué". Cette note n'était pas pour Courtney et Frances, mais pour les fans de Kurt, avec une petite note en bas de page pour Courtney et Frances. Si vous avez lu cette note, vous avez bien vu que Kurt n'y parle pas de se supprimer !
6 - Le fusil était retourné. L'assassin - puisque je pense qu'il s'agit d'un meurtre - pouvait-il savoir comment placer le fusil pour faire croire à un suicide ? Avez-vous vu la photo de Kurt tenant ce qui ressemblait à un revolver dans sa bouche ? Cette image est parue dans un magazine peu après la mort de Cobain. Elle a été prise plusieurs mois plus tôt, alors que Kurt s'amusait avec un pistolet en plastique. Kurt met le revolver dans sa bouche, son pouce droit maintenant la gâchette retournée ! Nous savons maintenant que Courtney avait une copie de cette photo chez elle, avant la mort de Cobain. Cette photo a-t-elle été utilisée comme modèle pour la mise en scène ?
8 - On a retrouvé trois cartouches chargées dans le fusil. S'il avait voulu se suicider, qu'aurait-il fait des deux autres balles ? Kurt a acheté ce fusil pour sa protection, et non pas pour attenter à ses jours.
La police est-elle dotée d'une imagination débordante ? Le fameux tabouret est mentionné dans un autre rapport de police...
Résumé du rapport # 94-156500 de l'officier Levandowski
Le 08 avril 94, vers 08 h 40, === arrive à *** Lake Washington, Bld. E, pour effectuer des travaux d'électricité. === longe le côté est du garage, et aperçoit la victime à travers un carreau de la porte vitrée. La victime est étendue sur le sol, un fusil en travers du corps, et une blessure ouverte à la tête. C. appelle les urgences. Les pompiers et la police répondent à l'appel. Sur les lieux, Levandowski observe la victime sur le sol, immobile. La porte vitrée est verrouillée. La voiture de pompiers 34 arrive. Les hommes forcent l'entrée en brisant un des carreaux. Les lieux ont étés photographiés par Levandowski, Fewel, et le sergent Getchman. La scène a été contrôlée jusqu'à l'arrivée des détectives de la Criminelle. Toutes les pellicules photo ont étés remises au detective Yoshida. Levandowski a remarqué que les portes vitrées à l'autre bout de la pièce, étaient bloquées par un tabouret, obstruant l'entrée.
MON COMMENTAIRE
Vous avez remarqué la dernière phrase de ce rapport ? Elle est clairement hors-sujet. Le rapport a l'air fini, et ce complèment d'information arrive comme un cheveu sur la soupe ! Comme je l'ai déjà mentionné, ces portes n'étaient pas verrouillées, et menaient seulement à un balcon. On ne pouvait pas accéder à la pièce par ces portes. De plus, ce petit tabouret en bois ne pouvait rien bloquer du tout ! Mais, naturellement, si vous n'avez pas été sur place, vous ne verrez jamais la différence. Alors, pourquoi cette ligne a-t-elle été rajoutée ? Parce que les détectives avaient déjà parlé du tabouret dans les médias. Ceux-ci avaient donc répandu la rumeur que Kurt s'était barricadé. Apparemment, quelqu'un a dû remarquer que le rapport de police ne correspondait pas au "mythe officiel", et a essayé de corriger cette impression. Qui a écrit ces lignes ? Je pense qu'elles ont été rajoutées à l'insu de Levandowski, sur la suggestion d'un tiers. Je ne m'interroge pas sur les intentions de Levandowski. Il semble consciencieux et minutieux. Mais s'il admet être personnellement responsable de cet ajout ridicule et délibérément trompeur, je reverrai mon opinion sur ses motivations, son intelligence et sa clairvoyance.
Et maintenant, voulez-vous un autre exemple de l'imagination de la police ?
Extrait du résumé de l'enquête principale. Police Criminelle rapport #94-156500 Détectives: Jim Yoshida et Steve Kirkland.
Cobain avait une unique blessure mortelle à la tête. Le fusil a été placé dans sa bouche, puis une balle a été tirée. Il y avait des marques sur ses mains de Cobain.
MON COMMENTAIRE
Nous savons que sur les mains de Cobain se trouvaient des marques, mais, parmi elles, aucune trace susceptible d'indiquer qu'il avait déchargé le fusil. J'ai fait revoir ce rapport par d'autres détectives et criminologues. Aucun d'entre eux ne peut se prononcer quant à l'origine de ces marques. Ce modèle de fusil n'est pas très répandu, mais nous avons localisé une arme identique au Nord de la Californie. Nous l'avons testée. Personnellement, j'ai tiré dix-huit fois sans me laver les mains. Pas une trace. Ces marques pouvaient elle être des résidus du coup de feu ou de suie ? Non, je reviendrai sur ce point plus tard. Évidemment, un reporter moyen ou un lecteur non averti ne relèverait pas ces détails du premier coup d'oeil. Un peu d'imagination et les médias seront vite convaincus du suicide de Kurt.
Vous vous rappelez l'affaire de la carte de crédit ?
Incident # 94-156500, dossier # 94-117. Détectives Steve Kirkland et Jim Yoshida. 13 avril 94, 9 h 00
Vérification du portefeuille de Cobain. Nous n'y trouvons pas de carte SeaFirst au numéro noté plus haut. Il y a deux autres cartes SeaFirst, avec des numéros différents.
MON COMMENTAIRE
Qui avait la carte ? Qu'est-il arrivé aux autres cartes de crédit de Kurt ? Je veux parler de celle qu'il a utilisée à Los Angeles pour prendre son billet chez Delta Airlines avant de quitter Seattle, et de celle que Courtney a "annulée". Les rapports de la banque montrent que quelqu'un a essayé de se servir de la carte "manquante" après la mort de Kurt, mais que les retraits d'argents ont cessé dès la découverte du corps. La police n'a jamais essayé de tirer ça au clair. Pourquoi ?
RÉALITÉ OU FICTION ?
Les gens peuvent penser : "Rien ne prouve que c'était un meurtre", mais soyez patient et n'oubliez pas... Il n'y a jamais eu aucune preuve que c'était un suicide, seulement des présomptions... et ces présomptions reposent sur des informations fallacieuses. Quelle que soit votre opinion, elle doit se fonder sur des faits réels, et non pas sur des détails déformés par la police et les médias.
Et gardez une chose en tête. Courtney Love a déclaré, le 10 avril 1994 : "Quelque chose de bon peut sortir de la mort de Kurt. Je ne sais pas encore quoi... mais quelque chose de bon."
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CHAPITRE 3
21/08/2006 08:56
EN LIGNE : TOM GRANT, DÉTECTIVE PRIVÉ
De retour à Seattle, mercredi 13 avril 1994
J'ai rencontré Rosemary Carroll, avocate, dans son bureau de Hollywood. Elle soupçonne Courtney d'avoir trempé dans la mort de Kurt, et trouve bizarre qu'elle ne veuille montrer à personne la prétendue lettre de suicide. Nous nous sommes mis d'accord : il vaut mieux pour moi que je retourne à Seattle poursuivre mon enquête.
Jeudi 14 avril 1994
Je me rends à la maison de Lake Washington. Courtney est assise devant la table de la salle à manger. Tandis que je m'avance pour m'asseoir, elle dit, "Je crois que je tiens le bon détective, cette fois-ci.". Le compliment est joli, mais il tombe à plat. Après que nous avons échangé quelques banalités, Courtney se lève pour aller chercher des cigarettes. Une femme s'approche de moi. Elle porte un tee-shirt noir, où est imprimé : "Grunge is Dead". Je suppose qu'elle est apparentée à Kurt, une soeur, ou peut-être une cousine. Elle se tient debout devant moi et me demande : - C'est vous, le détective ? J'acquiesce, et elle poursuit : - Que pensez-vous de tout ça ? Ne sachant pas qui elle est, je réplique simplement : - Je ne sais pas. À votre avis ? Elle répond en se présentant : - Je suis la maman de Kurt, Wendy. Je n'en sais rien. Quelque chose ne tourne pas rond. Pourquoi Dylan n'a-t-il pas jeté un coup d'oeil dans la serre ? Je dis à Wendy que j'aimerais bien m'asseoir en face d'elle pour discuter, dans quelques jours. Elle accepte et me dit qu'elle aussi souhaiterait me parler. Je remarque que Courtney nous observe par-dessus l'épaule de Wendy. Notre conversation semble l'inquiéter. Lorsqu'elle revient vers nous, Wendy s'écarte. Courtney prend Wendy dans ses bras et l'embrasse. Puis je vois Courtney murmurer quelques mots à l'oreille de Wendy. Le reste du temps que je passerai dans la maison, Wendy se montrera froide et distante.
Je n'ai qu'une idée en tête : il me faut voir la fameuse lettre. Je suis Courtney à l'étage. Nous nous asseyons sur le lit pour discuter. Puisqu'elle ne laisse ni ses amis proches, ni son avocat s'approcher de la lettre de suicide, il faut que je trouve un moyen de me procurer ce texte pour l'examiner. - Je vous ai entendu lire la lettre à la télévision l'autre jour, lui dis-je. J'ai été troublé par quelque chose. On aurait cru que la lettre disait "Je suis allongé sur le lit..." Si Kurt était bien couché sur le lit en rédigeant cette lettre, pourquoi le lit était-il bien fait lorsque je suis venu ici l'autre soir ? On n'aurait pas dit que que quelqu'un s'était allongé dessus... - Non Tom, c'est moi qui étais couchée sur le lit, dit Courtney. C'est moi qui étais dessus en enregistrant la lettre pour les fans de Kurt. - Êtes-vous sûr que c'est bien vrai, c'est vous qui avez dit ça ? lui demandai-je. J'ai eu comme l'impression que c'est Kurt qui disait qu'il était couché. - Mais non, je vais vous montrer, dit-elle en tirant une feuille pliée dissimulée sous un oreiller. Courtney me tend enfin la lettre en précisant : - Ce n'est qu'une copie. La police a conservé l'original. J'étudie la note, en faisant semblant de chercher la phrase en question dans le texte, et je dis soudain : - J'ai bien du mal à lire sans mes lunettes. Est-ce que je peux photocopier cette lettre sur votre fax en bas ? Je pourrais la lire plus tard. - Oui, bien sûr, marmonne Courtney tandis que son regard se fige. Lorsque je reviens à l'étage, Courtney est à genoux sur le sol, en train de feuilleter un carnet de téléphone. Le téléphone est posé à côté d'elle. - Pourriez-vous attendre en bas, Tom ? Quelques minutes plus tôt, elle se montrait très amicale ; à présent elle semble irritée.
Voyage à Carnation
Nous avions projeté un voyage à Carnation, où se trouve la résidence secondaire des Cobain. Eric Erlandson, le guitariste de Hole, était sensé nous accompagner mais avant de quitter la maison de Lake Washington, Courtney le prend à part. Eric quitta ensuite la maison au volant de sa caravane. Je dis alors : - Je croyais qu'Eric viendrait avec nous. - Il nous rejoindra là-bas, répond Courtney. C'est moi qui conduis Courtney à Carnation avec Kat Bjelland, le guitariste de Babes In Toyland, assis sur le siège arrière. Sur le chemin, elle maudit le "fils de pute" qui a révélé à l'Associated Press qu'elle avait a fait une overdose le 2 avril. Elle s'agite, et grogne : - Je vais trouver qui c'était, et poursuivre ce salaud en diffamation. Je peux prouver que j'étais à mon hôtel. On m'a vue là-bas. C'est un ramassis de mensonges. - Vous m'avez dit que c'est vous qui aviez lancé l'affaire ! dis-je. - Ah bon ? Et elle tourne la tête pour regarder le paysage. À deux reprises, Courtney demande que nous nous arrêtions pour manger un morceau. Puis, comme nous nous égarons, nous devons nous enquérir de la bonne direction auprès d'un fermier. Pourtant, Courtney s'est rendue dans la région à plusieurs reprises auparavant. Veut-elle nous faire prendre du retard ? Lorsque nous arrivons à la propriété, je remarque d'emblée deux bâtisses qui reflètent clairement les personnalités de Kurt et de Courtney. L'une est une vieille cabane meublée, l'autre une demeure toute neuve, inhabitée et vide. Nous entrons d'abord dans la vieille cabane. Courtney et Kat montent au grenier, et je reste au rez-de-chaussée pour jeter un coup d'oeil partout. Lorsqu'ils sont redescendus, Courtney tire un petit sac de tissu de la poche de son manteau : - Regardez, Tom. Kurt est venu ici ! dit-elle en tirant une seringue du sachet. N'importe quoi ! Kurt n'aurait jamais conservé une seringue dans un sac en tissu. Et pourquoi l'aurait-il laissée ici ? J'ai la vague impression que Courtney a apporté le sac avec elle. Quelques minutes plus tard, nous trouvons cinq rats morts dans les toilettes. ça fait un moment qu'ils se trouvent là, vu leur état. Il est évident que nul n'est venu à la cabane depuis fort longtemps ! Dans la nouvelle maison, nous mettons la main sur un sac de couchage, des mégots de cigarettes, et des canettes de soda dispersées un peu partout. Courtney veut que nous rapportions ces objets avec nous. Elle dit qu'elle veut y faire relever les empreintes digitales. Je me demande pourquoi faire... Je remarque également que Eric ne vient pas nous rejoindre. Est-il venu, puis reparti avant notre arrivée ? Courtney change d'avis au sujet des empreintes après une conversation étrange que nous avons dans la voiture. Je mentionne que j'ai travaillé sur des moulages et que le plus étonnant est qu'on peut dupliquer les empreintes digitales. Courtney a subitement l'air découragé. Plus jamais elle ne suggérera de relever les empreintes digitales. Est-ce que cela faisait partie d'un plan pour me faire croire que Kurt s'était réfugié à Carnation après avoir quitté le centre de désintoxication de Los Angeles ? De ma voiture, Courtney appelle un détective de la brigade des stupéfiants, Antonio Terry. J'apprendrai plus tard qu'elle a eu fréquemment Terry au bout du fil depuis la fuite de Kurt. Le détective Terry était même cité dans le rapport de police établissant la disparition de Kurt, comme témoin potentiel. Retenez le nom de Terry. Il reviendra par la suite. À un moment donné, Courtney sort de la voiture, et j'entends le présentateur radio Paul Harvey évoquer une rumeur circulant sur l'existence d'un pacte de suicide entre Kurt et Courtney. Courtney faisait sans cesse courir des rumeurs de ce genre et généralement, elle accusait les uns et les autres de les avoir colportées. Je me demande alors s'il existe une corrélation entre ses overdoses de samedi soir et de jeudi matin. Pensait-elle, alors, que Kurt allait mourir samedi soir ? A-t-elle supposé, ensuite, que nous découvririons le corps jeudi matin ? A-t-elle essayé, en somme, de maquiller l'affaire en un "pacte de suicide" dans lequel elle aurait tenté de respecter son propre engagement ?
Obstruction de l'enquête
De retour à la maison, je dis à Courtney que je souhaite parler à Cali et à Dylan en même temps. Courtney réplique : - Cali est en désintox à El Paso, ou en Géorgie... Non, il est à Los Angeles avec des copains. Et elle crie à Éric : - Appelle Cali et dis-lui de prendre le premier avion pour rentrer. Dylan arrive pendant que je suis à la cuisine. Courtney l'emmène dans sa chambre à coucher et il n'en ressort que vingt minutes plus tard. Lorsqu'ils refont surface, il est clair que Dylan vient de se piquer à l'héroïne. En le questionnant, je remarque que ses réponses sont surfaites, comme s'il avait été préparé à notre entretien. Il ne peut tenir la tête très droite à cause de la drogue. Il ne rime à rien de poursuivre cet entretien. Je quitte la maison en demandant à Éric de m'appeler dès l'arrivée de Cali. Quelques heures plus tard, je parle de nouveau à Éric. Il me dit qu'après mon départ, Courtney a rappelé Cali pour lui dire que ce n'était pas la peine qu'il vienne à Seattle. Eric ajoute : - Je ne sais vraiment pas ce qui se passe ici !
Samedi 16 avril
Ben Klugman est venu à Seattle pour m'assister dans mon enquête. Nous retournons donc à la maison de Lake Washington pour parler à Courtney. La personne qui m'ouvre la porte m'informe que Courtney est au premier étage, en train de dormir. Je lui demande si Wendy, la mère de Kurt, est là. Elle dit que Wendy est au rez-de-chaussée. Je lui demande alors de prévenir Wendy de notre présence, et de solliciter un entretien avec elle. La dame s'en va, et revient deux minutes plus tard : - Wendy n'a rien à vous dire ! L'électricien qui a découvert le corps de Kurt nous rejoint à notre hôtel. Il décrit la position du corps et du fusil. Il ajoute : - On aurait dit que Kurt sortait de chez le coiffeur ; ses cheveux étaient bien étalés et bien nets. Je sais bien que ce détail aurait pu jaillir diectement de l'imagination de ce type, mais je décide alors d'examiner les photographies de police.
Examen des documents
Je faxe avant tout plusieurs photocopies de documents (y compris la "note de suicide") à deux examinateurs de documents à Los Angeles. Les ayant étudiés, ils m'expliquent bientôt que c'est probablement Courtney qui a écrit la lettre laissée dans l'escalier, et pas Cali. Cette hypothèse n'est pourtant pas logique. Courtney était encore à Beverly Hills lorsque cette lettre apparut, comme par enchantement, sur les marches. Si les experts ont raison, tout porte à croire à une conspiration. Mais j'ai du mal à accepter leurs conclusions.
Rencontre avec la police
Je me rends au commissariat pour discuter avec le Sergent Cameron. Ensemble, nous évoquons les mobiles pouvant valider l'hypothèse d'un meurtre : - le suicide d'un conjoint rapporte plus que le divorce. - en cas de suicide, les ventes de disques de Kurt ne pouvaient que flamber et la carrière de Courtney décoller. Nous établissons la liste des incohérences et des contradictions dans les faits : - disparition d'une carte de crédit et retraits d'argent postérieurs à la mort de Kurt. - Courtney a ordonné à Dylan d'inspecter la serre, et il ne l'a pas fait. - la lettre retrouvée sur les escaliers signée par Cali n'a ni queue ni tête. - des doutes subsistent quant à l'écriture de la lettre de suicide (est-ce celle de Kurt ? ). - enfin, l'électricien est persuadé d'avoir aperçu la chevelure de Kurt soignée et peignée.
Je demande alors à Cameron : - Pourquoi m'avoir dit que la porte était verrouillée de l'intérieur ? Le mécanisme du verrou est extrêmement simple. N'importe qui aurait pu tirer sur la porte après avoir fermé le loquet ! - Il y avait un tabouret contre la porte, rétorque le sergent, un rien offusqué. Une fois encore, je suppose que la police a des preuves permettant d'affirmer que Kurt était seul. Lorsque je demande au Sergent de me laisser jeter un coup d'oeil sur les photos pour comprendre ce que l'électricien a cru voir, il répond : - Nous n'avons pas développé ces photos, et nous ne les développerons sans doute jamais. Nous ne développons pas les photos de suicides. Rien de ce que vous m'avez dit ne me semble convaincant. Pour moi, ça n'est rien d'autre qu'un suicide.
Suite de l'enquête
Je passe les quelques semaines qui suivent à tenter de déterminer si mes experts ont fait fausse route ou non. Au fil de mes propres examens, je conclus qu'ils se sont effectivement trompés. C'est bien Cali qui a écrit cette lettre retrouvée dans les escaliers à Lake Washington et pas Courtney. L'un des experts finit par admettre son erreur. L'autre reste ferme sur ses positions d'origine. J'appelle alors le détective Kirkland et lui fais savoir que les experts se sont trompés. Il ne comprend pas tout de suite la portée de cette erreur, parce que, depuis le début de l'enquête, il ne me prête aucune attention. Puis, je passe en revue des coupures de presse, et je les trouve toutes infestées de faux bruits. Un article décrit Courtney comme cloîtrée chez elle, prostrée, alors que je la sais déjà en Arizona, à Canyon Ranch, dans le lit de Billy Corgan, trois semaines après la mort de Kurt.
COURTNEY LOVE SUR LA SELLETTE
8 mai 1994
J'envoie une lettre à Courtney pour l'informer de mes soupçons sur la mort de Kurt...
Chère Courtney, Je suis sûr que vous savez depuis longtemps que mon enquête s'est révélée bien plus productive que vous ne pouviez le supposer au départ. Le but de cette lettre est de clarifier ma position quant à nos relations de travail à compter de ce jour. Vous vous souvenez certainement de notre petite expédition à Carnation, le jeudi 14 avril. J'ai mentionné en route que j'allais certainement exhumer de vieilles histoires qui ne vous plairaient pas. Je vous ai alors demandé si vous vouliez cependant que je continue de creuser. Kat, assis sur le siège arrière dit : "Oh oui, elle veut tout savoir". Vous avez vous-même répondu "Oui Tom, vous avez carte blanche. Je veux savoir tout ce qui s'est passé." Vos instructions étaient claires et, pendant les jours et les semaines qui suivirent, j'usai de ma "carte blanche". Tandis que l'enquête avançait, mes efforts pour accéder à la vérité me semblèrent délibérément freinés. En lisant quelques articles dans les journaux et les magazines, je découvris que les information transmises à la presse étaient souvent erronées ou délibérement trompeuses. Je pense que les circonstances qui entourent la mort de votre mari sont extrêmement suspectes. Mon enquête a mis au jour un certain nombre d'incohérences et de contradictions dans les faits rapportés. Je dois rendre compte de ce type d'éléments à la police. C'est pourquoi, le 15 avril dernier, j'en ai informé le sergent Cameron. Mon expérience m'a déjà appris que les policiers apprécient rarement l'intervention de détectives privés. J'ai décidé de continuer à travailler sur cette affaire, jusqu'à son dénouement, sans coût additionnel. Vous trouverez avec cette lettre une facture mentionnant les frais engagés jusqu'ici, et les dates des services rendus. Comme vous pouvez le voir, avant mon retour à Seattle, ces charges excédaient largement l'accompte que vous m'aviez versé. Néanmoins, considérez-vous comme quitte de cette facture. Dans ma quête de la vérité sur la mort de votre mari, votre coopération serait appréciée, mais non requise. Sincèrement, Tom Grant THE GRANT COMPANY
Je m'attendais à une réponse furieuse de Courtney, or elle me répondit en me recrutant de nouveau, mais pour une toute autre affaire. Ce travail, vraiment fastidieux, était sans aucun rapport avec la mort de Kurt. Lorsque je me fus acquitté de cette tâche, il m'apparut clairement qu'elle se fichait des résultats. Par la suite, Courtney m'encouragea à plusieurs reprises à poursuivre mon enquête, tout en me mettant dans les roues autant de bâtons qu'elle le pouvait. Chaque fois que je discutais avec des amis proches de Courtney au sujet de la mort de Kurt, elle s'empressait de louer mes services pour me ralentir en me focalisant sur un autre travail. Il semblait qu'elle n'ait plus tellement le choix : une sainte colère venant d'elle me mettrait la puce à l'oreille, une rupture totale de contacts ne lui permettrait plus de surveiller l'avancée de mes recherches. Courtney a peut-être cru me soudoyer en m'employant à plusieurs reprises. Courtney se dit persuadée que Kurt était avec Katlin avant de mourir. Katlin est un revendeur de drogue, qui habite sur la colline du Capitole de Seattle. À mon bureau de Beverly Hills, Cali a affirmé qu'il avait vérifié la serre le dimanche, mais avait décidé de ne pas y retourner : "C'est seulement une pièce sale, sordide et minuscule", a-il dit. En fait, j'ai découvert que la serre est une pièce étendue, très propre. Elle mesure 40 m2 environ ! Le 11 mai, dans le Seattle Times, Dylan déclara à un reporter qu'il ne se doutait pas de l'existence de la serre. "Je n'ai jamais su qu'une pièce supplémentaire était attenante à la maison." Une contradiction de plus : Dylan m'avait dit le contraire le jour où l'on avait découvert le cadavre de Kurt. Quelques semaines plus tard, Courtney a avoué qu'elle avait donné trente mille dollars à Cali pour suivre une cure de désintoxication dans l'est des États-Unis. Elle était furieuse parce qu'il avait emmené sa petite amie avec lui. Je ne pouvais m'empêcher de me demander si, là encore, un cadeau n'achetait pas le silence d'un témoin précieux.
COURTNEY LOVE
Les journalistes ou les écrivains pourraient tenter de décrire ainsi la personnalité de Courtney Love : flamboyante, frivole, une vraie provocatrice. Mais Courtney sait faire usage de ses attributs de baby-doll, de ses paroles détonnantes et de son attitude choquante pour masquer ses problèmes psychologiques. En ma qualité de détective privé, en quête de réponses face à une mort inexpliquée, je suis capable d'envisager Courtney sous un angle complètement différent. Pour moi, Courtney est une femme extrêmement intelligente. C'est aussi une psychopathe et une opportuniste. Elle n'hésitera pas à se servir de qui bon lui semble pour servir ses ambitions de gloire et de fortune. Bien sûr, je ne suis pas psychologue, mais le déséquilibre mental de Courtney est tellement évident que je ne pense pas avoir besoin d'être diplômé pour identifier le problème La spécialité de Courtney, c'est ce don particulier qui lui permet de manipuler les hommes pour arriver à ses fins et assouvir ses besoins. Elle change de tempérament comme un caméléon. À la moindre critique, elle se fait passer pour une victime. Elle se complaît dans le rôle de la femme-enfant, tendre et vulnérable, tout en admettant ne pas être une sainte. Courtney sait pleurer sur commande. Elle abuse de ce talent pour attirer les sympathies. Courtney admet qu'elle est menteuse et opportuniste. Elle porte ces titres comme un étendard. En manoeuvrant ainsi, elle tire toujours son épingle du jeu. Ses débordements sont souvent excusés d'un haussement d'épaule. Qu'est ce qui se trame vraiment dans cet esprit chaotique ? Prêtez l'oreille aux paroles de Courtney. Lisez ses interviews avec soin. Elle se dévoile elle-même !
Conversation téléphonique avec Tom Grant (3 avril 1994) : Dans mon entourage, les gens ont peur de moi, alors ne vous foutez pas de ma gueule ! US Magazine (août 1994) : Kurt ? Génial, certainement, mais une rock star ? Kurt ? Non. J'étais sur le point de le surpasser. C'est pourquoi j'ai fini par me dire "Je ne suis pas sur Terre pour m'envoyer en l'air avec une rock star. Je suis là pour être une rock star." Rolling Stone (15 décembre 1994) : Mon ambition me garde en vie... et si vous croyez un seul instant que vous pourrez m'empêcher d'arriver là où je veux aller, vous vous fourrez le doigt dans l'oeil. Extrait d'un courrier électronique destiné aux fans de Kurt Cobain (ils ont accusé Courtney d'exploiter la mort de son mari) : J'ai le feu aux fesses, alors, enculés, vous pouvez avoir une sacrée trouille !
LA PRÉTENDUE NOTE DE SUICIDE
Je me suis demandé si Kurt était bien l'auteur de ce texte. Cela m'a pris du temps pour en être sûr, mais je suis finalement certain que Kurt l'a effectivement rédigé. Je suis sûr qu'il a intégralement écrit cette lettre de sa main, quoique l'on puisse douter de l'authenticité de la dernière phrase. Après examen de la copie de la lettre, l'épaisseur du trait sur ce morceau de phrase me semble plus mince que le reste du texte. Ceci peut indiquer un changement de crayon ou de stylo, ou l'existence d'un scripteur différent. Plusieurs experts ont étudié l'écriture de cette lettre, et leurs opinions sur ces derniers mots varient. Pour ma part, cet ajout n'est pas un élément déterminant. Nous avons recueilli suffisamment d'indices qui indiquent que Kurt était sur le point de quitter Courtney. Les insultes et les critiques de sa femme étaient parvenues à le convaincre qu'il exerçait une influence néfaste sur sa propre fille. S'agissait-il, en tout cas, d'une lettre annonçant son suicide ? Au départ, je ne savais pas. Mais en repassant mes notes au crible, en étudiant l'affaire et en grapillant des informations tout en travaillant avec Courtney, je conclus qu'il s'agissait d'une simple lettre de Kurt, adressée à ses fans, leur expliquant pourquoi il comptait quitter l'industrie rock, et arrêter les tournées et les concerts. Lisez ce document attentivement. Cet homme tient beaucoup à ses fans. Il est capable d'affection envers eux. Certes, c'est un toxicomane, il a des tares, mais il semble tenir aux autres plus qu'à lui-même. Cette lettre reflète-t-elle l'image d'un père narcissique qui ne se soucie pas de sa fille ? A-t-il l'air de ne pas s'inquiéter des souvenirs qu'il lui laissera, des images de violence et de destruction physique que Frances associera toujours à son souvenir ? Ces observations constituent-elles des preuves suffisantes pour affirmer que Kurt Cobain ne s'est pas suicidé ? Non. C'est simplement pour que vous saisissiez mieux ce que Kurt pensait en rédigeant cette lettre. Certains journalistes prétendent que cette lettre n'a aucun sens. Ca, c'est parce qu'ils la lisent en pensant à un suicide. Une fois que l'on comprend qu'il ne s'agit que d'annoncer une retraite anticipée, cela coule de source. Imaginons un instant que Kurt soit vivant et en pleine forme. Son groupe s'est dissout, et lui-même a quitté Seattle. Tous ses concerts ont été annulés. À présent, relisons la lettre. Imaginons que Kurt l'a écrite pour expliquer certaines choses à ses fans. Tout s'éclaire !
QUI EST BODDAH ?
Dans un article publié il y a deux ans, Wendy O'Conner, la mère de Kurt, a raconté que dans son enfance Kurt avait un ami imaginaire appelé Boddah. D'après nos recherches, l'ajout du mot "prononcé" après le nom Boddah fait références aux croyances bouddhistes de Kurt Cobain. Pour les non-initiés, il semble que Kurt s'adresse à Dieu, mais en réalité, les mots signifient : "À tous les hommes éclairés." Cette théorie est certainement plus crédible que celle de l'ami d'enfance imaginaire : Cobain s'adresse à ses fans, ceux qui le comprennent, ceux qui sont "éclairés". Le plus important ici, c'est le corps de la lettre. Il nous apprend en tout cas à qui cette lettre ne s'adresse pas. Cette lettre n'appartient pas à Courtney Love. Elle a été rédigée à l'intention des fans de Kurt. Elle appartient aux fans de Kurt. Que veut dire Cobain en écrivant : Toutes les alertes données par les théoriciens du rock punk au fil des années, depuis ma première initiation à, disons, l'éthique qui accompagne l'indépendance et l'étreinte de votre communauté, se sont révélées réelles ? Je crois que Kurt a voulu expliquer qu'il avait été mis en garde contre l'appât du gain, la corruption et l'exploitation dans l'industrie rock. Que penser de la phrase à la fin de la lettre ? Je ne ressens plus de passion et, souvenez-vous en, mieux vaut se consumer que de s'affaiblir et disparaître. C'est ce qu'on dit généralement pour justifier une démission ou, dans le monde du spectacle, un adieu à la scène prématuré, en pleine gloire. Que disait-il en écrivant : "Je t'en prie Courtney, tiens bon, pour Frances, pour sa vie...." ? Lorsque j'étais avec Courtney au Peninsula Hotel, quelques jours avant que l'on découvre le cadavre de Kurt, elle me dit presque exactement la même chose : Il doit faire la tournée de Lollapalooza, au moins pour son bébé, pour Frances. Kurt, sans aucun doute, avait entendu cette rengaine auparavant. Il ne voulait plus de ce train de vie. L'argent lui importait peu, mais il savait que la gloire et le fric comptaient beaucoup pour Courtney. Même si Kurt souhaitait mettre un terme à son mariage, il aimait encore Courtney. Il s'en allait, mais il était prêt à la soutenir.
Lors d'une interview qu'elle donna à David Fricke, du magazine Rolling Stone, Courtney répondit à une question à propos de la prétendue note de "suicide" retrouvée près du cadavre de Kurt.
David Fricke : Est ce que, selon vous la lettre de suicide de Kurt a vraiment un sens ?
Courtney Love : Il m'a écrit une autre lettre, plus longue, différente de la note de suicide. Je l'ai mise dans un coffre-fort. Je la montrerai sans doute à Frances, un jour. L'écriture est vraiment dégueulasse. Ca dit : Tu sais que je t'aime, que j'aime Frances, et que je suis désolé. Je t'en prie, ne me suis pas. La lettre est longue parce qu'il se répète sans arrêt : Je suis désolé. Je suis désolé. Je suis désolé. Je serai là, je te protégerai, je ne sais pas où je vais, je ne peux pas rester ici plus longtemps.
Il y avait donc une autre lettre ! Pourquoi n'en avait-elle rien dit à personne auparavant ? Le 19 janvier 1995, Courtney et moi avons discuté au téléphone pendant près d'une heure, à ce sujet.
Tom Grant : Qu'en est-il de cette autre lettre ? Celle dont vous avez mentionné l'existence dans Rolling Stone... Courney Love : C'est plutôt une lettre personelle, pas une explication de son suicide. C'est comme, ça ressemble plus à, enfin c'était dans une enveloppe cachetée, et c'était, ben, adressé rien qu'à moi, et on dirait qu'il l'avait écrite en désintox. - Où l'avez-vous trouvée ? - Dans ma chambre, sous mes coussins. - Sous vos coussins ? - Ouais, et je n'en ai pas parlé mais Rosemary et moi, on en a parlé au Sergent Cameron. - Ah oui... - Je la lui ai montrée... - Il n'y a qu'un problème avec cette lettre, Courtney... - Quoi ? - J'ai regardé sous vos oreillers. - Et... - J'ai même regardé, avec vous, sous votre matelas. - Elle était bien là pourtant. - J'ai trouvé le Rohypnol sous le matelas. Cette lettre n'a jamais été derrière vos oreillers. - Mais si, Tom... et je l'ai montrée au sergent Cameron, et il peut le prouver. Je la possède. Je vous la montrerai. Quoi que vous... si vous voulez vraiment la voir. - Oui, j'aimerais vraiment y jeter un coup d'oeil. Mais ce que je vous dis, c'est que la lettre n'était pas dans votre lit la veille du jour où l'on a découvert le corps, ni la veille de la veille. Parce que, vous pourrez vérifiez avec Dylan, nous avons soulevé les coussins. Nous cherchions de la drogue. Nous avons même retourné les matelas. C'est là qu'était dissimulé le Rohypnol. Il n'y avait pas de lettre dans une enveloppe cachetée. - Elle était bien... bien... elle était dans une.... une... une longue enveloppe, une enveloppe blanche, cachetée. Mon nom était dessus, et c'était vraiment l'écriture de Kurt, et la lettre était sous mes coussins. - Bon, d'accord. - J'ai un tas de coussins sur ce lit, elle était bien là. - Bon, puisque vous le dites !
Courtney a-t-elle révélé l'existence de cette "autre" lettre à Rosemary Carroll ? C'est plus qu'improbable. En tout cas, elle ne l'a pas fait avant plusieurs mois. Au début de mon enquête, Rosemary complétait mes informations en ce qui concernait l'implication de Courtney dans la mort de Kurt. Elle m'aurait parlé de cette "autre lettre" si elle avait été tenue au courant. Courtney l'a-t-elle vraiment montrée au Sergent Cameron ? Je n'en sais rien. Mais si tel était le cas, elle aurait dû figurer comme pièce à conviction dans les registres de la police. Le fait qu'elle n'y soit pas indique que Courtney ment, ou que la police a délibérément choisi de couvrir l'information.
Résumons-nous. Il y avait deux lettres. L'une d'elles expliquait à ses fans ses raisons de quitter la scène. L'autre, adressée à sa femme, annonçait la séparation du couple. Ni l'une ni l'autre n'étaient suicidaire ! L'une de ces lettres fut sciemment cachée au public, alors que Courtney faisait semblant de m'encourager dans mon enquête sur le meurtre de Kurt. Pourquoi avoir caché cette seconde lettre ? Parce que, lorsqu'on les assemble, la deuxième lettre prouve sans aucun doute possible que la première n'était pas une lettre de suicide !
EN LIGNE : SEAN MC GILL, JOURNALISTE
TIRER PROFIT DE COBAIN
Je ne l'aurais jamais cru si je ne l'avais vu de mes propres yeux : Jerry Harrison, le père de Courtney Love, assis aux côtés d'une brochette d'éditorialistes de la presse à scandale dans l'émission télévisée de Geraldo. Bien entendu, je l'avais déjà aperçu lorsque les tabloïds lui couraient derrière comme des mouches à miel après le suicide de Kurt. Il avait l'air plutôt courtois, prêt à répondre aux questions portant sur la manière dont sa fille supportait la disparition de Cobain. Un an plus tard, il rejoint les rangs de ceux qui exploitent à des fins personnelles la mémoire de Kurt. Permettez-moi de dire, toutefois, que cet article ne vise pas toutes les personnes qui ont souillé la mémoire de Cobain. Je n'ai pas pour but de crier au sacrilège. Cobain a lui-même suffisamment sali sa réputation alors qu'il était encore en vie. De plus, je ne l'ai jamais considéré comme un génie de la musique. Mais il n'y a rien de mieux que la mort pour vous faire passer du stade de la rock star à celui d'idole. Avant la disparition d'Elvis, tout ce que les gens savaient de Priscilla Presley est qu'elle était le premier amour du King, et qu'il l'avait épousée. Après sa mort, elle est devenue actrice - cherchant désespérément à se dissocier de feu son époux, tout en conservant son nom. Idem pour Lisa Marie Presley, qui aurait pu épouser un pauvre hère du Bronx, mais préféra Michael Jackson et passe en prime time à la télévision. Jimi Hendrix et Jim Morrison survivent sur des tee-shirts, des posters, et d'innombrables remaniements de leurs albums. Il y a aussi mon coup préféré : quand une vedette mythique disparaît, on retrouve toujours, une ou plusieurs années après sa mort, des bandes miraculeusement restées inédites jusqu'alors ! Mais du moins leur exploitation post-mortem n'est-elle pas l'oeuvre de leurs proches. Que quelqu'un porte un tee-shirt avec l'effigie de Cobain en souvenir de sa musique ne me gêne pas. C'est le capitalisme en action. Il y a une demande de produits, les fournisseurs y répondent et empochent des millions au passage. Mais lorsque je ne peux pas allumer la télévision sans qu'apparaisse à l'écran Courtney Love, alors là, ça m'ennuie ! Que des étrangers essayent d'exploiter la mort de quelqu'un, soit. Mais pas sa veuve ! Avant que Courtney épouse Kurt, Hole n'était qu'un petit groupe de gonzesses révolutionnaires, que l'on confondait souvent avec les L7 ou Babes in Toyland. Même pendant le temps de leur mariage, Courtney était toujours accompagnée de Kurt, et si on lui posait dix questions en interview, la moitié portait sur son mari. Mais aujourd'hui, elle est omniprésente, on la voit dans toutes les soirées, accoutrée comme une figure de cauchemar. À son actif, nous dirons qu'elle est restée fidèle à ce qu'elle était il y a dix-huit mois. Elle est toujours provocante, a des démélés occasionnels avec la drogue, et mène sa vie comme elle l'a toujours fait. La seule différence, c'est qu'aujourd'hui, ça intéresse les gens. Si elle a l'air fatigué sur scène, c'est à cause de son chagrin ou des pilules qu'elle prend, et Rolling Stone nous en fait un compte-rendu détaillé. Je sais que la faute revient en partie à la profession. Courtney Love est le sujet le plus en vogue dans le monde rock actuel, et les medias ne peuvent l'occulter puisque ils ont l'assurance d'en tirer quelque chose qui vaut la peine d'être mis sous presse. Après tout, c'est bien la veuve de Kurt Cobain ! Et c'est tout ce que Courtney est réellement : la veuve de Kurt Cobain. En dehors des récompenses attribuées à son album Live through This, et de la couverture médiatique qu'elle suscite, son existence n'a jamais vraiment interpellé grand monde. Love, son père et Hole ne doivent leur notoriété qu'à Cobain, et je crois qu'ils devraient le reconnaître ou se taire. Arrêtez de nous prendre pour des andouilles. Drew Barrymore, l'ex-petite fille qui jouait dans E.T., sort actuellement avec le bassiste de Hole. Si elle se tue, Hole deviendra le groupe de rock le plus célèbre du monde.
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CHAPITRE 4
21/08/2006 08:59
EN LIGNE : TOM GRANT, DÉTECTIVE PRIVÉ
LES RÉVELATIONS DU RAPPORT DE POLICE
J'ai finalement reçu les copies du rapport de police. Il indique que Kurt avait deux autres cartes de crédit Versateller dans son portefeuille, près de cent-vingt dollars en liquide tombés par terre et soixante-trois dollars dans la poche de son manteau. En étudiant le rapport plus attentivement, j'ai découvert qu'on nous avait donné, à la presse et moi-même, des informations mensongères. La fameuse carte de crédit sur laquelle il y avait eu opposition n'était pas en possession de Kurt au moment de sa mort.
PAS D'EMPREINTES SUR LE FUSIL
Le rapport de police indique également que le fusil a été envoyé au laboratoire d'analyses criminelles, pour qu'on y vérifie la présence d'empreintes. Le rapport d'analyse d'empreintes dit : "L'objet ci-dessous a été examiné le 06 mai 1994 par le sergent détective technicien T. Geranimo. Quatre types d'empreintes ont été relevés, aucune d'entre elles n'était claire." Je me demande comment Kurt aurait pu être capable, juste avant de devoir subir une cure de désintoxication, de manipuler ce flingue sans y laisser la moindre empreinte.
4 juin 1994
Le détective Terry, de la brigade des stupéfiants, a été assassiné. Il est le premier officier de police de Seattle à être tué dans l'exercice de ses fonctions en neuf ans. J'ai lu les nouvelles, et bien que se soit une assez grosse coïncidence, personne n'a pensé à faire de rapprochement entre le meurtre du policier et l'affaire Cobain. J'aimerais quand même en savoir davantage.
15 juin 1994
Kristen Pfaff, la bassiste de Hole, le groupe de Courtney, est retrouvée morte d'une overdose. Son corps a été découvert dans sa baignoire à Seattle. Kristen est morte alors qu'elle s'apprêtait à quitter Seattle. Dans une récente interview, Courtney a dit qu'elle avait dû arracher au corps de Kristen le compagnon de celle-ci, Eric. Courtney était donc à Seattle au moment de la mort de Kristen. Je trouve les circonstances de cette mort très suspectes. Kristen était sur le point de quitter Seattle et de s'éloigner de Courtney. Était-ce une coïncidence... ou un meurtre ?
DES SUICIDES D'IMITATION
On entend actuellement parler de quelques suicides d'imitation. Si Kurt a pensé que le suicide était la réponse à ses problèmes, alors, beaucoup de ses fans pensent pouvoir résoudre les leurs de la même façon. Je suis consterné que personne, dans le clan Cobain, n'évoque cette question ouvertement pour essayer de mettre un terme à ces morts insensées.
UNE AUTRE COÏNCIDENCE ?
Le 17 juin
L'original de la note de "suicide" a été restitué à Courtney. La police lui a également renvoyé la note de Rome. Courtney avait confié celle-ci à la police pour une analyse graphologique. Je trouve intéressant que la police ait renvoyé les dernières preuves matérielles de la mort de Kurt, le lendemain du décès de Kristen Pfaff, à une meurtrière possible !
ÉTOUFFONS L'AFFAIRE
Tandis que je continuais mon enquête, de Beverly Hills, j'ai essayé de contacter Cali. Il habitait alors Los Angeles, il lui aurait été facile de venir à mon bureau. Mais chaque fois que je me concentrais sur Cali, Courtney me faisait perdre mon temps sur des affaires sans aucun intérêt. Finalement, Courtney a essayé de me faire signer une clause de confidentialité. Je lui ai dit de m'envoyer une copie pour que j'y jette un coup d'oeil. Mais j'ai ajouté : "Je ne signerai rien qui puisse gêner mon enquête." Courtney voulait également que Cali et l'une de leurs amies, Renée Naverette, signent une clause de confidentialité. Elle a dit : "Tous ceux qui travaillent pour moi doivent signer." Pourquoi maintenant ? Courtney connaît Cali depuis des années...
RÉPONSES À VOS QUESTIONS
Certains de mes lecteurs m'ont demandé : "Est-ce que vous prétendez que Courtney elle-même a appuyé sur la détente ? " Non. Je n'ai jamais dit ça. Une lecture attentive des données indique clairement que Courtney était avec moi à Beverly Hills quand Kurt est mort. Cela étant, elle peut avoir commandité un meurtre commis par une tierce personne. J'ai détenu et fourni plus d'informations que quiconque sur cette affaire. Vous pouvez ne pas être d'accord avec ce que je dis, sauf sur ce point : il est temps de recevoir de vraies réponses de la police, du médecin légiste, de Courtney Love, de Rosemary Caroll, et de bien d'autres...
QU'EN EST-IL DE DYLAN CARLSON ?
Dylan était le meilleur ami de Kurt. Il est héroïnomane, mais très intelligent et au fond, c'est un brave type. Je suis à présent totalement convaincu que bien qu'il ait été manipulé, il ne savait pas que Kurt allait être tué. Courtney manipule Dylan, ainsi que quelques autres, pour servir ses desseins. Elle a suffisamment d'argent et de pouvoir pour obtenir ce qu'elle désire. Certains, dans son entourage, la sous-estiment, d'autres sont aveuglés par sa gloire, et sa fortune. Viennent ensuite ceux qui sont absolument terrifiés.
Dylan savait-il que Kurt était déjà mort ? Entre mercredi soir et jeudi matin : non. Jeudi soir quand nous sommes revenus... c'est possible. Je crois que Courtney essayait de diriger Dylan pour qu'il découvre le corps, mais il était vraiment désorienté par ce qui se passait. Le jeudi en fin d'après-midi, Dylan savait que Kurt était mort. Plus tard cette nuit-là, Courtney lui a dit : "Vérifie la serre." Pourquoi ne l'a t'il pas fait ?
Dylan, meilleur ami de Kurt, a-t-il cru à la thèse du suicide ? Non. Pas du tout. Lorsqu'on lui demandait si Kurt était suicidaire, Dylan se montrait catégorique : "Non. Il veut juste s'éloigner de tout ça. Il déteste la plupart des gens dans l'industrie du disque." Dylan connaissait Kurt avant que Courtney entre dans sa vie. Dylan le connaissait probablement mieux que quiconque. Voici quelques unes des choses que Dylan m'a confiées tandis que nous étions assis dans un petit café, dans les environs de Seattle. "Je ne comprendrai jamais pourquoi ils se sont mariés. Ils se battent tout le temps." En faisant référence à des amis et fans de Kurt à Seattle, Dylan m'a dit : "Kurt est embarrassé par sa grande maison. Il doit supporter beaucoup de choses à cause de ça. Ils le considèrent comme un traître ou quelque chose dans ce genre. Quand Courtney a acheté cette grosse voiture, une Lexus, Kurt la lui a fait rapporter au concessionnaire." Dans une interview avec un journaliste du Seattle Post Intelligencer, destinée à alimenter un article publié une semaine après la mort de Kurt, Dylan a fait les commentaires suivants : Kurt voulait juste faire de la musique... Nous pratiquions le tir ensemble. Il disait qu'il voulait une arme pour se protéger... Carlson a déclaré que les managers de Nirvana et la femme de Cobain, Courtney Love, ont poussé le musicien à entamer une cure de désintoxication. Il disait que Cobain était inquiet, mais ne semblait pas se décourager... Kurt faisait face à beaucoup de choses assez lourdes, mais il était réellement gonflé à bloc. Il était prêt à tout affronter.
Maintenant lisez, avec une attention redoublée, ce compte-rendu d'une de ses déclarations : Carlson a dit qu'il n'avait eu connaissance d'aucune tentative de suicide. Il ne pense pas que le coma de Cobain, après l'overdose de Rome, ait résulté d'une tentative de suicide, comme cela a été récemment avancé par Courtney Love.
Si l'incident de Rome avait réellement résulté d'une "tentative de suicide", pourquoi Courtney n'en a-t-elle pas parlé au meilleur ami de Kurt ? N'aurait-elle pas voulu que celui-ci garde un oeil sur lui ? Non. Courtney savait que si elle avait dit à Dylan que l'incident de Rome était une "tentative de suicide", il aurait su qu'elle mentait, puisqu'il en aurait parlé à Kurt. Rappelez-vous que personne n'appelait cet incident une "tentative de suicide" avant que Kurt meure à Seattle. C'est après la mort de Kurt, et seulement après sa mort, que Courtney a raconté que l'incident de Rome était une "tentative de suicide."
POURQUOI ROSEMARY CARROLL NE DIT-ELLE RIEN ?
Quand elle est venue me voir à Los Angeles, le 13 avril 1994, Rosemary pensait que Courtney était impliquée dans la mort de Kurt. Durant les quelques mois qui ont suivi, nous en avons reparlé de temps à autre au téléphone, et nous nous sommes rencontrés chez elle, à Los Angeles. Elle m'a alors fourni d'autres éléments incriminant Courtney. Rosemary ne croyait pas que Kurt ait été suicidaire ou que l'incident de Rome soit une "tentative de suicide." Sa première réaction à la note dite "de suicide" était une totale incrédulité ! Elle était convaincue que Courtney avait rédigé la note de "suicide" de Seattle. Elle dit qu'elle était pleine d'expressions utilisées par Courtney et non par Kurt. Est-ce que Courtney a aidé Kurt à rédiger sa lettre "d'adieu à la scène", une lettre destinée par elle à devenir plus tard une "note de suicide" ?
PLUS DE DOUTES
En décembre 1994, après huit mois d'investigation, j'ai accumulé suffisamment de preuves pour être convaincu, au-delà du possible, que Kurt Cobain ne s'était pas suicidé. Je suis sûr qu'il a été assassiné. Quand j'ai commencé a parler des conclusions de mon enquête, j'ai reçu une lettre menaçante du cabinet d'avocats de Rosemary. Le 29 décembre 1994 je lui ai envoyé une lettre recommandée...
Chère Rosemary, Ayant reçu la lettre de menaces de procès et de poursuites judiciaires de votre cabinet, je me demande ce qu'il se passe dans votre tête ! Ma loyauté envers vous, et la confidentialité de nos conversations s'achèvent brutalement. Depuis le début, vous avez joué un rôle majeur dans cette enquête, en exposant des faits et détails impliquant Courtney en tant qu'élément capital de l'affaire. Je suis sûr que vous savez, au fond de vous-même, la vérité sur ce qui s'est vraiment passé. Il est temps pour vous de vous faire connaître et de révéler aux autorités tout ce que vous savez. Je suis conscient qu'il y a beaucoup d'intérêts en jeu pour vous. Votre carrière, votre mariage, des pertes financières et qui sait, d'autres choses encore ? Vous les mettez en danger que vous gardiez le silence ou non. Vous m'avez donné l'impression d'être une personne sensée et moralement solide. Pouvons nous prétendre à une quelconque bonté d'âme si nous laissons en liberté un individu coupable de meurtre ? Le monde du secret présente bien des périls, surtout si votre esprit garde scellées des informations nécessaires à l'inculpation d'un criminel. N'oubliez pas, par ailleurs, que de nombreux jeunes se suicident désormais en prenant Kurt pour modèle ! Le dernier de ces incidents est arrivé il y a juste quelques semaines. Bien que je me sente toujours en danger, j'ai le sentiment que mon silence aurait représenté une menace plus grande encore pour ma vie. Se débarrasser de quelqu'un après qu'il a parlé est tout simplement stupide et ne peut qu'attirer plus d'attention sur une affaire. Le vrai danger existe avant que la personne ne parle. J'espère vous avoir donné matière à réflexion. Appelez-moi si je peux faire quelque chose. Si vous choisissez d'être contre moi dans cette histoire, je ne peux que vous souhaiter bonne chance... vous en aurez certainement besoin.
Sincèrement, Tom Grant.
SI VOUS AVEZ TELLEMENT DE PREUVES, POURQUOI N'AVEZ-VOUS PAS FAIT ARRÊTER LES COUPABLES ? POURQUOI N'AVEZ VOUS PAS TOUT SOUMIS À UN TRIBUNAL ?
La plupart des lecteurs connaissent déjà la réponse à cette question, que soulèvent quelques sceptiques désireux de me démonter par des idées simplistes et mal formulées. Bien que beaucoup d'enquêteurs comme moi soient d'anciens officiers de police, nous agissons dans le privé, sans aucun pouvoir accordé par l'État. Un privé peut seulement enquêter, et fournir des informations. Il ne peut pas enregistrer des affaires, porter des charges en matière criminelle, ou procéder à des arrestations dans les affaires confiées aux autorités locales.
QUEL MOTIF AURAIT EU LA POLICE DE SEATTLE POUR BÂCLER ET ÉTOUFFER UNE ENQUÊTE ?
La réponse courte : l'orgueil professionnel. Quand, pour la dernière fois, avez-vous vu des représentants officiels admettre qu'ils avaient tort, spécialement dans une affaire de cette envergure ? Maintenant la réponse longue... Après avoir assisté à la veillée à Seattle en mémoire de Kurt Cobain, un jeune homme est rentré chez lui et a brutalement mis fin à ses jours, d'une balle dans la tête. Dans le sud de la Turquie, une adolescente souffrait de dépression depuis qu'elle avait appris la mort de Cobain. Elle a mis une chanson de Nirvana sur sa chaîne stéréo. Elle a fermé la porte de sa chambre et s'est brûlé la cervelle. En Australie un adolescent s'est suicidé en hommage à Cobain. À Tracy, en Californie, un jeune de vingt ans, devant des amis, s'est enfoncé le canon d'un fusil dans la bouche et a dit "Regardez, je suis comme Kurt Cobain". Puis, il a tiré. Ce ne sont là que quelques exemples de ces suicides par imitation qui sont survenus depuis la mort de Cobain. Vous vous interrogez toujours à propos des motifs de la police ? J'ai rencontré la police juste une semaine après la mort de Kurt. J'avais déjà, à ce moment-là, assez d'éléments pour montrer que quelque chose sonnait terriblement faux dans les événements entourant la mort de Kurt. C'était trop tard : les suicides par "identification" avaient déjà commencé. Ces jeunes ne se sont pas tués simplement parce que Kurt était mort. Ils se sont tués parce que ce prétendu "suicide" les avait troublés. Si quelqu'un doute ce que je dis, il devrait lire quelques unes des milliers de lettres que j'ai reçues des fans de Nirvana. La mort de Kurt aurait été une perte tragique et triste pour ses fans, mais son "suicide" a provoqué un court-circuit. Que pourrait dire la police de Seattle aux amis et fans de Cobain, et à toutes ces familles ravagées par la mort de ces victimes de la désinformation ?
LE TAPAGE MÉDIATIQUE ET LES DÉTAILS "GORE"
Attention : les informations qui suivent concernent l'état du corps de Kurt Cobain, quand il a été retrouvé à la résidence de Lake Washington, au mois d'avril 1994. Elles sont plutot explicites. Il n'y a pas d'autre façon de parler de ça, sans utiliser la terminologie descriptive et carrée déjà employée par d'autres. Si vous êtes sensible aux détails crus, mieux vaut passer cette section du texte.
Contrairement à la croyance populaire, le souffle du coup de feu a causé très peu de dégats visibles, et la tête de Kurt Cobain n'a pas explosé. C'était une décharge intra-orale. Le canon du fusil était placé à l'intérieur de la bouche, contre le palais. Des fragments sont restés dans la tête du sujet. Le coup de feu était "pénétrant" et la balle n'est pas ressortie. Il en résulte qu'il n'y a pas eu de giclées de sang ou de tissus, caractéristiques des coups de fusil dans le visage. Il y avait une mare de sang sur le sol, provenant du suintement, et l'on pouvait constater des dommages à l'intérieur de la bouche, ceux que le rapport de police a appelés : "traumatisme ouvert à la tête". Mais, contrairement aux photos truquées qui ont circulé, il n'y avait pas de blessure réellement béante. Bien que crispé et légèrement déformé par les effets de la décomposition, le visage de Kurt conservait des traits intacts et reconnaissables. Si ses empreintes digitales ont été relevées, c'était pour les nécessités légales d'identification, et non parce que le visage était méconnaissable. Le fusil était un calibre 20. C'est une arme moins puissante que le calibre 12, plus courant chez les usagers. Mais même avec sa charge plus faible, cette arme aurait dû normalement causer bien plus de dommages.
LES RÉSULTATS CONFIDENTIELS
La police de Seattle et le bureau du médecin légiste sont autorisés à ne pas rendre publiques certaines informations du dossier médical, telles que l'état du corps et les causes de la mort. Il en résulte que le descriptif n'est pas fourni au public ou à la presse. Ceci est fait de manière à assurer à la famille de la victime une certaine confidentialité et à protéger la dignité du defunt. Dans beaucoup de cas, la loi est bien faite. Dans ces circonstances, toutefois, elle a contribué à l'occultation des faits tandis que les médias et la "famille" continuaient à abreuver le public de fausses informations. Courtney Love exploite en permanence la mort de son mari. Pendant les interviews, par exemple, elle insiste généralement sur le fait qu'elle porte les vêtements de Kurt. Elle passe son temps à développer des anecdotes supposées prouver son tempérament suicidaire. Courtney aime en rajouter sur les détails sanguinolants. Répondant à une question dans Rolling Stone, elle dit : Quand vous avez eu le sang de votre mari sur le visage, il est pénible d'en parler. Et quand vous vous promenez avec sur le dos le manteau dans lequel il s'est fait sauter la cervelle, il est encore plus difficile de se montrer créatif... Lors d'une autre interview, elle s'effondre, hystérique, en parlant de la possibilité que Frances puisse voir un jour une photo de son père avec sa saloperie de tête explosée. Courtney a su dès le début que la tête de son mari n'avait pas éclaté, et que toutes les photos parues dans la presse d'un homme avec la tête "explosée" n'étaient pas celles de de Kurt Cobain ! Alors, pourquoi tout ce délire ? Pourquoi cette propagande ? Pourquoi Courtney insiste-elle tant sur ces images horribles, violentes, et fallacieuses, de l'homme qu'elle dit avoir aimé...
UNE THÉORIE ACCEPTABLE
Certains lecteurs ont écrit pour dire qu'ils croient que Courtney peut avoir délibéremment poussé Kurt au suicide. C'est une conclusion assez raisonnable, compte tenu de ce que nous avons vu et de la quantité limitée d'informations transmise au public à cette date. J'ai moi-même, le plus sérieusement du monde, pris cette possibilité en considération, pendant plusieurs mois. Il était devenu évident que Kurt voulait s'éloigner de Courtney. Peut-être a t-il juste baissé les bras et décidé d'en finir ? Les incohérences, les contradictions et un supplément d'enquête de ma part ont finalement exclu cette théorie. Ce n'était pas un suicide. Tout indique que Cobain, au moment de sa mort, n'était pas suicidaire... Le 21 mars 1994, People Magazine écrit, à propos de l'incident de Rome : L'incident est survenu au moment ou Cobain semblait plus en paix avec lui-même qu'il ne l'avait été depuis des années. Dans le Rolling Stone en date du 15 décembre 1994, le journaliste David Fricke déclare : Il y a un an, il me disait qu'il était plus heureux que jamais. Et franchement, je l'ai cru. Et dans le Seattle Post Intellignecer, Dylan Carlson affirme : Kurt disait qu'il voulait un fusil, mais c'était pour protéger sa famille... Il savait que s'il achetait l'arme à son nom, la police viendrait la lui confisquer. C'est pourquoi il a utilisé mon nom.
Queques jours avant la mort de Cobain, Joe Mama, un vieil ami du couple, lui rend visite au centre de désintoxication où il est hébergé. Il affirme : Je m'attendais à ce qu'il ait la tête dans le cul et l'air dépressif. Pourtant il semblait être dans une sacrée forme. Kurt a rencontré plusieurs psychologues au cours de sa désintoxication. Aucun d'entre eux ne l'a jamais ressenti comme suicidaire ! Kurt trompait tout le monde... ou Courtney le faisait ! Qui devrions-nous croire ?
La police elle-même n'utilise qu'un petit nombre d'arguments pour étayer son l'idée que la mort de Kurt serait un suicide. Elle fait référence à ces détails comme "correspondant à un suicide", ou "correspondant à une blessure" provoquée par coup de feu tiré par la personne elle-même. Pour chaque élément qu'elle qualifie de "correspondant à un suicide," je peux dresser une liste contenant bien plus de détails autour de la mort de Kurt, ne "correspondent pas" à un suicide. Vous en trouverez ici quelques uns : - Peut-on manipuler un fusil après une injection théoriquement "mortelle" d'héroïne et de valium ? - Il restait trois balles dans le fusil. - Aucune empreinte n'a été relevée sur le fusil. - La lettre retrouvée sur les lieux n'annonce en rien l'imminence d'un suicide. - Une autre lettre a été gardée secrète, dans laquelle il annonçait son intention de quitter Courtney Love. - Aucune lettre destinée à la mère de Kurt n'a été retrouvée, et aucun mot n'a été laissé par lui à sa petite fille Frances, pour l'aider à comprendre son geste quand elle serait plus grande. - Très riche, et père d'un enfant en bas âge, Kurt est mort sans avoir terminé le testament qu'il était en train de rédiger auprès d'un notaire.
Comment peut-on vraiment penser que Kurt a planifié son "suicide" avec suffisamment d'avance pour acheter une arme, écrire une lettre interminable à ses fans, et se donner la mort sans aucune pensée pour ses amis proches, sa mère, que tout le monde connaissait comme la "gardienne de son âme", ni pour la personne qu'il aimait plus que tout au monde, sa fille ?
Il reste cependant un point à examiner : Kurt Cobain a bien écrit une chanson intitulée Je me déteste et je veux mourir. D'abord, si vous estimez que l'on peut prendre au pied de la lettre les paroles des chansons, c'est que vous ne prêtez pas attention à la plupart des celles que vous entendez. De plus, dans une interview de Kurt publiée en janvier 1994 dans Rolling Stone, David Frickes demande : L'une des chansons que vous avez coupée à la dernière minute, dans In Utéro était I Hate Myself And I Want To Die. Faut-il prendre au pied de la lettre le titre de cette chanson ?
Réponse de Kurt : Pas plus qu'une blague. Et c'est la raison pour laquelle nous l'avons retirée. Nous savions que les gens ne comprendraient pas ; ils l'auraient prise au sérieux. C'était tout à fait satirique, nous nous moquions de nous-même. Nous pensions à une sorte de type un peu schizophrène, défoncé, pisseux toujours à se plaindre et qui ne cesse de vouloir se tuer. Je me suis dit que ce serait un titre marrant. J'ai longtemps voulu que ce soit le titre de l'album. Mais je savais que la majorité des gens ne le comprendraient pas.
Kurt avait raison. Ils n'ont pas compris...
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CHAPITRE 5
21/08/2006 09:13
EN LIGNE : DAVID PERLE, FAN DE COBAIN. IL CONTESTE LES ALLÉGATIONS DE TOM GRANT ET VEUT LAVER COURTNEY LOVE DE TOUT SOUPÇON
Tom Grant, qui s'improvise procureur, ne possède aucune preuve tangible de ce qu'il avance, et ne peut citer aucun témoin à charge réellement désireux d'accuser Courtney Love. Ses théories apparaissent tout à fait contestables, pour peu que l'on veuille bien se rappeler les faits suivants : - Kurt Cobain a manifesté des tendances suicidaires pendant des années. Il ressemblait bien à une personne capable de se donner la mort. - Courtney Love a sauvé la vie de Kurt à de multiples reprises. Elle l'aimait profondément. Il est donc extrêmement peu probable qu'elle se soit donné le mal que prétend Tom Grant pour faire assassiner son mari. - Le témoignage de Grant est un tissu de citations anonymes. Il nous promet régulièrement des révélations saisissantes, mais nous les attendons encore, et rien ne nous permet d'affirmer que nous les lirons un jour.
L'ATTITUDE DE COURTNEY
Je ne prétends pas être objectif. D'abord, je suis un fan de Kurt Cobain et, à ce titre, j'éprouve un certain respect pour sa veuve, Courtney Love. Mais il vrai que je mentirais si je disais ne pas avoir perdu une part de ce respect pendant les deux dernières années. Après tout, elle a fait en deux ans un certain nombre de choses étranges, controversées et parfois même, pernicieuses. Quoi qu'il en soit, elle reste égale à elle-même. Elle est forte. Elle se conduit comme Kurt l'aurait souhaité. Je pense que beaucoup de ceux qui adhèrent à la théorie de Tom Grant n'aiment pas Courtney. Je ne sais vraiment pas pourquoi tant de gens éprouvent de l'animosité à son encontre. Je reconnais que ces derniers temps, elle agissait de façon à repousser le grand public. Mais il ne faut pas oublier une chose : les défauts pour lesquels elle est détestée sont précisément ceux grâce auxquels Kurt est tombé amoureux d'elle ! Pour appuyer mes dires, et pour mettre fin à tout ces "Kurt n'aurait jamais voulu qu'elle vive ainsi", voici quelques paroles de Kurt Cobain...
J'ai vécu de nombreuses expériences, mais rien d'aussi gratifiant qu'avoir un enfant de Courtney. Elle est l'exemple même de la dignité, de l'éthique et de l'honnêteté. Ma femme défie l'injustice, et la raison pour laquelle son caractère a été si sévèrement critiqué est qu'elle refuse catégoriquement de se plier aux normes des hommes Blancs corporatistes. Ces règles préétablies font de la femme un être soumis, silencieux et sans ambition. Lorsque ces règles ne sont pas respectées, l'homme, menacé, prend peur.
Ces lignes sont claires comme de l'eau de roche. Il l'aimait vraiment. Un autre jour, lors du Reading Festival, en Angleterre, il déclara :
Je veux dédier cette chanson à ma fille de douze jours et à mon épouse. Certains propos très exagérés ont été tenus à notre sujet, surtout sur ma femme, et elle pense que tout le monde la déteste Alors, puisque ce concert est enregistré, pourquoi ne pas lui faire parvenir un message et lui dire "Courtney, on t'aime !" D'accord ? Vous êtes prêts ? Je compte jusqu'à trois. Un, deux, trois ! (La foule l'acclame alors et hurle "Courtney, We love You ! ")
Il est très important de garder à l'esprit que Kurt a toujours épaulé sa femme, parce qu'il l'aimait. Tous ceux qui ont pu lire les réactions de Cobain lors du scandale déclenché par Vanity Fair, savent que Kurt voulait littéralement tuer la journaliste qui avait colporté des calomnies sur Courtney. Gardez cela à l'esprit en lisant la thèse de Tom Grant.
De plus, Grant fait de Kurt un être à part, surnaturel, quasi-angélique, et diabolise Courtney en la dépeignant, elle, comme une salope et une meurtrière. Ignore-t-il à ce point que Cobain était attiré par sa femme parce qu'elle était avant tout son double féminin ? Il semble que Tom Grant ne connaît pas réellement Kurt Cobain.
Avant de m'engager davantage, je souhaiterais soulever les rumeurs selon lesquelles Courtney serait devenue une "Marie couche-toi là" depuis la mort de Kurt. Nombreux sont ceux qui utilisent cet argument non seulement pour la faire passer pour une pute, mais aussi pour démontrer son manque de respect envers son mari. Partisans ou non de la thèse du suicide, tenez compte de ce qui suit : voilà une femme qui s'efforce de rendre son mari heureux, de le maintenir en vie et qui, un beau jour, se réveille et s'aperçoit qu'il s'est tué. Il est parti. Il l'a abandonnée. Il n'est pas inhabituel que des gens, dans ce cas de figure, ressentent un manque d'affection tel qu'ils puissent se jetter dans les bras de gars comme Billy Corgan (chanteur des Smashing Pumpkins) ou Trent Reznor (du groupe Nine Inch Nails). C'est, au pire, révélateur d'une certaine faiblesse de caractère de sa part. Ne la détestez pas pour autant. Elle a été abandonnée. Ca ne veut pas dire qu'elle n'aimait pas Kurt de tout son coeur. De toute façon, il n'y a pas preuve du contraire.
UNE ABSENCE TOTALE DE TÉMOINS
Lorsque j'ai lu pour la première fois les dossiers de Tom Grant, en juin 1995, j'en ai été abasourdi. Tels qu'ils sont décrits dans ce texte, les agissements et les déclarations de Courtney Love ne peuvent qu'indigner. Grant nous fait assister aux mensonges qu'elle a propagés dans la presse. Cette femme semble habitée par le mal et nous met en colère. Toutefois, il est possible de lire le dossier Grant comme je l'ai fait, avec un état d'esprit différent. On ne peut qu'être soufflé par ce tissu d'élucubrations infondées, par ce récit que n'étaye pas l'ombre d'une preuve matérielle. Pensez-y. Il n'y a pas l'ombre d'une preuve ! À un moment précis, Tom Grant cite un certain nombre d'informations particulièrement compromettantes sur le couple Love-Cobain, fournies par l'avocate du couple, Rosemary Carroll. Au début, ces révélations m'ont sérieusement perturbé. Par exemple, Grant précise que Rosemary Carrol ignorait que Kurt était suicidaire, qu'elle soupçonnait Courtney d'être mêlée à la mort de son mari, etc. Il s'agissait bien là d'un témoignage troublant J'étais de plus en plus ennuyé, jusqu'à ce que j'avance dans ma lecture. Un peu plus loin, en effet, on découvre que, lorsqu'il a rendu publique son dossier, Grant a reçu une lettre du cabinet de Rosemary Caroll, lui intimant l'ordre de cesser d'attribuer à celle-ci des déclarations fantaisistes, sous peine de procès. Grant produit alors une copie de sa réponse à la firme d'avocats, texte dans lequel il dit, en gros, qu'il ne sait vraiment pas quelle mouche les a piqués. Rosemary "sait" que Courtney est coupable, alors "pourquoi me faire ça ? " Je pense qu'une large partie de sa lettre est, en réalité, destinée à ses lecteurs qui sont, déjà, tous ralliés à sa cause. Il se trouve donc que Grant n'a absolument aucune preuve de ce qu'il avance. Et nous n'avons, par conséquent, aucune raison particulière de croire que ce suicide masque un meurtre. Dans un même ordre d'idées, Grant fait référence à un certain nombre d'informations calamiteuses sur Cobain que lui aurait confiées Dylan Carlson, un très bon ami de Kurt. Mais, si Grant peut mentir sur ce que Rosemary Carroll aurait affirmé, il est raisonnable de croire que les "citations" de Dylan sont également une pure invention. Grant décrit Carlson comme un junkie mais s'empresse d'ajouter : "Il est intelligent".
DIVORCE, VOUS AVEZ DIT DIVORCE ?
Je suis curieux de savoir comment Grant peut décemment déclarer que Kurt et Courtney se préparaient à un méchant divorce. Pas de sources, pas d'infos, rien. Personne dans mon entourage n'a jamais dit une chose pareille. Courtney et Kurt étaient très amoureux l'un de l'autre, si l'on fait abstraction des sautes d'humeurs sporadiques du chanteur après sa dose d'héroïne. Courtney Love m'a dit qu'il n'avait jamais été question de divorce entre eux. Je tiens à signaler pourtant que Courtney, Krist, Dave et bien d'autres amis de Kurt avaient tous menacé d'abandonner le chanteur à son triste sort s'il ne se débarrassait pas rapidement de sa dépendance à la drogue. Mais ça n'avait rien à voir avec un divorce brutal : leur unique motivation était de prendre soin d'un homme qu'ils aimaient tous.
Tom Grant raconte comment Courtney Love est passée maîtresse dans l'art de manipuler tout et tout le monde. Grosso modo, elle dirait un certain nombre de choses simplement pour rallier des gens à sa cause, et se servirait d'eux, sans qu'ils en soient conscients. C'est drôle. C'est exactement l'effet que donne Tom Grant. On dirait qu'il gagne sa vie en écrivant des éditoriaux ! Il prend un ton paternaliste et donne des leçons à tour de bras : "Attention, les enfants, la drogue, c'est mal. Mais nous devons avoir de la compassion, la toxicomanie n'est qu'une faille, nous ne devons pas détester la personne qui a ce problème..." Il propose d'ailleurs sur son site les coordonnées d'un centre d'assistance pour maniaco-dépressifs et, même là, se montre insensible puisqu'il décrit le suicide comme "la voie facile"...
Plus loin, Tom Grant explique que Kurt Cobain s'est acheté un fusil parce qu'il craignait pour sa vie depuis qu'il avait refusé de participer à la tournée Lollapalooza. N'est-ce pas un peu ridicule ? Devons-nous croire que Kurt avait peur de Peter Farrell, ou de l'un de ses sous-fifres, parce qu'il ne voulait pas donner de concerts ? Allons, soyons sérieux. Heureusement, Grant ne s'attarde pas trop sur cette crétinerie, préférant se rabattre sur la thèse plus populaire de la culpabilité de Courtney. À plusieurs reprises la police s'est rendu chez les Cobain pour cause de tapage nocturne. Le département de police de Seattle a conservé une grande quantité de documents à ce sujet. Même les officiers de police s'accordaient à dire que Cobain était suicidaire, et confisquaient régulièrement sa collection d'armes à feu. Ils savaient bien qu'un jour il se tuerait. C'était leur avis. Si Courtney Love avait voulu se débarrasser son mari, elle n'aurait eu qu'à le laisser faire. Si elle-même a alerté la police pour emporter toutes les armes, cela prouve qu'elle ne souhaitait pas le voir mourir.
LA LETTRE DE SUICIDE
Tom Grant passe son temps à disserter sur le fait que la lettre de suicide de Kurt ne ressemble en rien à une vraie lettre de suicide, mais plutôt à une lettre d'adieu à la scène. En fait, cette lettre correspond totalement à ce que pourrait écrire un junkie avant de se donner la mort. La lettre de Cobain n'a évidemment ni queue ni tête. Et pour cause : il n'avait pas tous ses esprits au moment de s'injecter la faramineuse dose d'héroïne qui lui sera fatale. Un autre fantasme de Tom Grant est sa théorie selon laquelle l'écriture au bas de la note ne serait pas celle de Kurt. Vous l'ignorez peut-être, mais un homme appelé Richard Lee, de Seattle, présentateur d'une émission télévisée hebdomadaire, enquête lui aussi sur le "meurtre" de Kurt Cobain. Il méprise Tom Grant. Bien qu'il soit entièrement convaincu que la mort de Cobain ne résulte pas d'un suicide, il reconnaît que la police de Seattle a consulté trois graphologues pour authentifier la lettre. Tous les trois certifient que les derniers mots de la lettre ont bien été écrits par Kurt. Je le répète : il n'y a aucun doute, Cobain a bien entièrement rédigé cette note lui-même. Elle n'a nullement été fabriquée par un tiers. La seule raison pour laquelle les gens ont pu croire que quelqu'un d'autre avait inscrit quelques mots en bas de page est que les caractères sont un peu plus épais et pas tout à fait identiques à ceux du reste de la note. Cobain a probablement ajouté ces mots après s'être injecté une dose massive d'héroïne, ce qui, on le comprend bien, est de nature à affecter les capacités motrices.
LA CARTE DE CRÉDIT
Certes, la carte de crédit manquante est un élément important du dossier Grant : l'édition du Seattle Times, datant du 11 mai, signale que des poursuites judiciaires ont été entamées contre un dealer à qui Cobain aurait cédé sa carte banquaire. Il semblerait que le chanteur, souffrant de terribles maux d'estomac, ait voulu se procurer de la drogue pour soulager sa douleur. N'ayant pas de liquidités sur lui, il a donné sa carte de crédit à un revendeur (logique, il s'apprêtait à se suicider et par conséquent, n'allait plus en avoir besoin !) qui s'empressa de retirer des sommes astronomiques de son compte. La police finit par comprendre que Cobain n'y était pour rien, puisque le chanteur n'était plus en mesure de dépenser de l'argent après le 5 avril. Est-ce si difficile à comprendre ?
UN DÉTECTIVE PAS SI PRIVÉ QUE ÇA
Je souhaiterais ouvrir une parenthèse sur la morale de Tom Grant, en tant que détective privé. Il ne m'a pas l'air aussi privé que ça. Vous la trouvez privée, son enquête ? Il peut affirmer tant qu'il veut que Courtney "va lui faire la peau", ce sont des conneries et il le sait ! Mais s'il est tellement paranoïaque, il y a d'autres façons de se protéger contre des menaces de mort. Il pourrait, par exemple, déposer des preuves accablantes dans un coffre fort, puis prévenir les avocats de Courtney qu'elle s'exposerait à de graves ennuis si quelque chose lui arrivait. Tom Grant sait qu'il divulgue des informations réservées aux forces de police. Après avoir reçu une lettre du Département de défense des consommateurs Californiens, lui demandant de rendre des comptes à ce sujet, il se justifie en disant qu'il a transgressé les règles en connaissance de cause, parce qu'il soupçonne Courtney depuis le début de l'affaire. Ce n'est évidemment pas une explication valable. Il ne fait en réalité que confirmer le caractère illégal de son enquête.
Tom Grant recommande de ne pas écouter Courtney parce que, selon lui, c'est une folle et une menteuse. Une question : pourquoi devrions-nous écouter Tom Grant ? Courtney n'est peut-être pas mère Téresa, mais qui l'est aujourd'hui ? C'est la parole d'une personne contre celle d'une autre.
Grant présente Courtney sous un jour peu favorable dans son enquête. Il la rend coupable de ceci, de cela Bien sûr, il a travaillé pour la police... et alors ? En quoi cela garantit-il qu'il n'est pas tordu ? Est-il si difficile de s'imaginer qu'un détective privé puisse... mentir ?
LES FAITS INDISCUTABLES
Tom Grant demande : "Quelle preuve avons-nous que la balle mortelle a été tirée par Kurt ?" Mais quelle preuve Tom Grant a-t-il qu'elle ne l'a pas été ? Cobain s'est échappé du centre de désintoxication Exodus, à Marina del Rey, près de Los Angeles. Un effet bien connu du manque d'héroïne est une dépression importante. Kurt était connu pour être dépressif et sa famille comptait déjà quelques suicidés parmi ses membres. Cobain avait par ailleurs, fréquemment, de graves problèmes avec son estomac. Bien sûr, en cure, il lui était impossible d'employer l'héroïne pour soulager sa douleur. Cela a pu accroître son désarroi. Kurt a donc décidé qu'il était prêt à en finir. Il rédige une note expliquant sa décision. Une lettre destinée à ses fans - et non à ces imbéciles qui finiront un jour par accuser sa femme. Il ajoute à son texte des annotations séparées pour sa femme et sa fille. Des notes qui ne nous étaient pas forcément adressées. C'est une histoire simple, triste, et cruelle. Il n'y a pas grand mystère là-dessous
QUI EST COURTNEY LOVE ?
Dylan Carlson pense que Kurt n'était pas suicidaire. Mais qu'une période d'accalmie dans son comportement ait pu précéder sa mort ne prouve rien, sinon qu'il était dans l'oeil du cyclone. D'après Carlson, le directeur artistique de Nirvana et Courtney Love ont poussé le musicien à entrer en cure de désintoxication. Cobain avait un peu d'appréhension, mais ne semblait pas abattu. "Kurt faisait face à un certain nombre de soucis, mais il avait l'air d'encaisser" raconte Carlson.
"TOUT LE MONDE EST CONTRE MOI"
Grant nous raconte la façon dont la police l'a trompé. Quelle raison y a-t-il pour que nous lui accordions plus de crédit qu'à la police, ou qu'à Courtney, sa famille et ses amis ? Tout cela ressemble au snobisme qui consiste à dire que "les médias sont tous des cons." Cette rengaine revient souvent au galop chez les supporters de Grant. "Les médias mentent ! La police ment ! Tom Grant lui, ne ment jamais !" Grant nous parle aussi de l'amour que Kurt portait à sa fille, et nous dit à quel point Cobain était peiné qu'elle puisse entendre plus tard que ses parents étaient un couple de drogués. Grant pense que c'est l'une des raisons pour lesquelles il ne se serait pas tué. Apparemment, M. Grant ne sait pas grand-chose de ce qu'est une dépression, ni des extrémités auxquelles elle peut pousser. Grant cite des extraits de People magazine, à propos de l'incident de Rome : "Ironiquement, cet incident a eu lieu à un moment où Kurt semblait plus en paix avec lui-même qu'il ne l'avait été depuis des années." Je ne sais pas d'où ils ont sorti cette histoire, parce que tous les gens qui l'ont approché à cette période savent qu'il était en pleine confusion. Nous avons de bons enregistrements du concert de Rome, et la musique est vraiment bonne, mais Kurt ne dit rien. Le seul mot qu'on entende de lui est "Gracias !". Il prononce quelques paroles çà et là, essayant d'être drôle, mais on sent bien qu'il fait de son mieux pour masquer sa détresse. Je peux presque imaginer ce qu'il devait penser... Ceux d'entre-nous qui possèdent des albums de Nirvana en concert, savent que, même s'ils ne parlaient pas entre chaque chanson, les membres du groupe racontaient souvent des blagues et des histoires. En tout cas, beaucoup plus que lors de l'horrible concert à Rome.
Voici une liste de ce que Grant considère comme des "invraisemblances" :
- La combinaison coup de fusil/overdose :
Grant explique que des enquêteurs confirmés de la Criminelle lui ont dit qu'habituellement, on se tue avec l'un ou l'autre, pas avec les deux. Que l'on ait dit ça à Grant ou pas, quelqu'un ment ici. En effet, on m'a rapporté qu'il n'y a là rien de rare. L'une de mes sources affirme : "Pourquoi quelqu'un aurait-il réalisé toute cette mise en scène, alors qu'il aurait simplement suffi de droguer Cobain à mort, sans courir le moindre risque ?" Quoi qu'il en soit, un autre ami m'a assuré que, même dans un état second provoqué par la drogue, on peut fort bien se servir d'un fusil : comme chacun le sait, Cobain était héroïnomane et planait complètement quand il est passé à l'acte. S'il ne s'était pas défoncé, peut-être serait-il encore là.
Trois balles dans le fusil :
Si, comme le prétend Grant, Kurt redoutait vraiment l'intrusion des organisateurs de la tournée Lollapalooza, c'est peut-être pour cette raison que le fusil était chargé. De plus, tout le monde sait que Kurt voulait assurer sa sécurité et celle de sa famille. C'est sans doute pourquoi le fusil était prêt à l'emploi. Quant au nombre de balles chargées, cela n'a rien à voir avec un meurtre, puisque Kurt avait préparé le fusil avant son départ pour la clinique Exodus.
Pas d'empreintes digitales :
Il n'y avait pas d'empreintes digitales lisibles sur le fusil, dit Grant. Comme si l'on pouvait saisir une arme, poser ses mains sur toute la surface de la crosse et du canon, puis le pointer sur son visage sans laisser la moindre trace ! Au moins, Grant est honnête sur ce point même s'il déforme tout. Le fusil utilisé était un Remington M-11, calibre 20, semi-automatique. S'il n'y a pas eu d'empreintes relevées sur l'arme, c'est parce que L'EXAMEN N'A PAS ÉTÉ FAIT ! La scène avait tout l'air d'un suicide quand les autorités sont arrivées et personne n'a vu l'intérêt de vérifier si les empreintes de Kurt se trouvaient sur le fusil. Je sais, en revanche, que le médecin légiste a relevé des marques de brûlures sur les mains de la victime, et ces marques sont révélatrices de la manière dont il tenait le fusil pour le diriger contre lui-même. La voilà, la véritable preuve du suicide !
La lettre de Cobain :
- Pour Grant, il ne s'agit que d'une longue note destinée à ses fans et non la dernière lettre d'un suicidé. À mon avis, ce que Grant veut prendre pour une stupide "lettre d'adieu à la scène", est une véritable lettred'adieu, tout court. Cobain voulait s'en aller. Si vous relisez la note dans cette optique, est-elle vraiment insensée ? Je ne le pense pas. Imaginez Kurt Cobain seul dans la pièce, bourré d'héroïne, sur le point de se tuer. Tout s'éclaire. La théorie de Grant selon laquelle Cobain allait tout quitter pour vivre, tel un ermite, de racines et de baies dans une forêt, est des plus ridicule.
Selon Grant, il existait une autre note, conservée à l'abri des regards, dans laquelle Cobain n'annonçait nullement son intention de se suicider, mais celle de quitter Courtney. C'est encore un de ces indices que Grant présente comme concluants, alors qu'il ne peut même pas en prouver l'existence. Rien n'étaye cette idée selon laquelle Courtney et Kurt allaient divorcer prochainement. Ce ne sont là que fantasmes dans l'esprit du détective. Grant va jusqu'à dire que Courtney s'est lancée à la recherche de l'avocat "le plus vicieux" pour s'occuper de son divorce. Il faut savoir que Kurt et Courtney avaient signé un accord pré-nuptial, ce qui rend un combat procédurier parfaitement inutile, et prouve que Tom Grant est un fieffé menteur. De plus, Grant nous raconte que Courtney soupçonnait Kurt de la tromper. Quelle imagination débordante ! Personne d'autre n'a jamais soulevé une telle hypothèse, et le détective ne nous indique pas ses sources...
Grant souligne que Cobain n'a pas adressé de lettre à sa mère ni à sa fille. C'est vrai, mais Kurt avait déjà parlé à sa mère. Elle savait ce qui se tramait. Elle n'ignorait pas qu'il finirait par se tuer. Nul besoin qu'il en rajoute. D'ailleurs, généralement, la plupart des gens ne laissent pas de lettre lorsqu'ils se suicident. Celle de Kurt était adressée à tous. Il avait plus de fans que d'amis intimes. Quant à sa fille Frances, Kurt ne lui a laissé aucune indication sur la façon dont il lui faudra, plus tard, interpréter le geste de son père. Il se préparait à se tirer une balle dans la tête. Il aurait pu tout aussi bien écrire une lettre à toutes ses connaissances. Il n'en a simplement pas eu le temps. Grant s'étonne de ce que Kurt n'ait pas attendu, pour se "suicider", d'avoir fini de rédiger son testament. Tom Grant échoue quand il essaie de se mettre dans la peau de Kurt. Pourquoi veut-il désespérément trouver une logique à tout cela, alors que, par définition, le suicide n'a rien de rationnel ?
Grant affirme enfin que des intérêts financiers pouvaient pousser Courtney Love à préférer la mort de son mari à un divorce. Il semble ignorer que Courtney possédait, en propre, un joli pécule, bien avant sa rencontre avec Kurt. Elle n'avait aucunement besoin de davantage d'argent.
On me demande souvent si je sais, dans ces conditions, pourquoi Grant a monté toute cette affaire. En toute sincérité, je l'ignore. Peut-être court-il après la notoriété, mais je ne crois pas. Il est détective de police en retraite : peut-être son bureau ne marchait-il pas très bien ? Peut-être a-t-il voulu attirer l'attention sur lui, afin qu'on lui demande d'enquêter sur des dossiers rémunérateurs ? Une seule chose est sûre : ce qu'il raconte est faux. L'essentiel de l'imposture de Grant repose sur l'idée que le suicide de Kurt Cobain ne correspondait à aucune logique. La vie de Kurt prouve le contraire, de son enfance vécue dans la violence, à son adolescence sans domicile fixe, en passant par sa maladie de l'estomac et son accoutumance aux drogues dures... Une vie pareille en aurait poussé bien d'autres au suicide !
Pour terminer, j'aimerais inciter tout le monde à écrire à Tom Grant. Je suis sûr que vous ne croyez pas que Kurt Cobain ait pu être l'homme dont Grant dresse le portrait. Alors, faites connaître votre point de vue à Grant. Faites lui savoir qu'il n'a pas le soutien de la communauté Internet.
EN LIGNE : JENNIFER LEBLANC, QUI RÉFUTE LES ARGUMENTS DE TOM GRANT
Moi non plus, je ne crois pas que Kurt ait été tué. Je comprends pourquoi il s'est suicidé. J'ai écrit à Tom Grant pour réfuter quelques arguments qu'il avançait. Je lui ai dit qu'il se comportait comme une " putain des médias". Je continuerai à lui écrire tant qu'il fera ces déclarations stupides. Il est évident que Tom Grant n'a jamais lu un article sur Kurt. Dans beaucoup de ses déclarations à la presse, celui-ci admettait volontiers ses tendances suicidaires. Tom Grant ne comprend pas ce que sont la dépression, et la dévastation qui peut en résulter. J'ai été dépressive pendant des années... et, comme Kurt, j'ai vécu des années de torture à cause de brûlures d'estomac chroniques. C'est pourquoi oui, je comprend les raisons pour lesquelles Kurt s'est suicidé. Je me sens abandonnée. Je ne connaissais pas Kurt personnellement, mais quand l'un d'entre nous accepte la défaite face à la dépression, c'est terrible. M. Grant ne comprend rien à rien.
EN LIGNE : JONATHAN DAVIS, QUI MAINTIENT QUE COBAIN S'EST SUICIDÉ.
Cobain avait un problème avec l'héroïne, et souffrait de douleurs à l'estomac, dont l'origine constitue encore un mystère (on sait seulement que sa mère manifeste des symptômes similaires. Cobain a souvent dit dans ses interviews que l'héroïne était le seul réconfort qu'il ait trouvé pour affronter ses maux d'estomac, ainsi qu'une grave scoliose et une dépression chronique. La dépression n'est pas un simple état dont on peut se "sortir". Il s'agit en réalité d'un désordre physiologique grave. Ce désordre se soigne, mais le patient ne peut pas obtenir la guérison sans aide extérieure. Et je pense que Kurt était entouré de trop de flatteurs, qui considéraient sa dépression comme la manifestation d'un "tempérament d'artiste".
EN LIGNE : COURTNEY LOVE ET DAVID PERLE DISCUTENT PAR COURRIER ÉLECTRONIQUE.
De : Courtney Love À : David Perle Sujet : page anti Tom Grant Vendredi 9 février 1996
Grant ne pompe pas mon énergie, mais il a déjà tellement détruit. Diffusez bien l'idée que je vais lui répondre. Mais être obligée de parler de balistique avec le médecin légiste ou le chef de la police, ça me rappelle vraiment trop ce drap blanc ensanglanté... Ce type ne m'aime pas ! On ne peut pas le poursuivre en justice, il habite dans un garage et possède une vieille Datsun. Personne, dans les médias ou dans le monde, ne peut le toucher. Il n'a rien, tout Seattle crierait au meurtre et nous serions dans de beaux draps. Il ne vaut pas la peine que je perde mon temps, il est horrible et dégueulasse. Un sale anniversaire de la mort de Kurt en perspective. Ce n'est pas drôle... OK... salut... Courtney
De : David Perle À : Courtney Love Samedi 10 février 1996
Eh, vous n'avez pas besoin de me convaincre que Grant n'a rien à avancer ! Ce qui est horrible, c'est que beaucoup de gens croient le contraire... Voulez-vous que je publie votre courrier électronique (sans votre adresse, évidemment) sur mon site Internet ? J'ai reçu hier un courrier électronique de quelqu'un qui m'a demandé si je ne me faisais pas passer pour vous. J'ai répondu "non", et ce correspondant a dit que c'était étrange que quelqu'un qui n'a aucun lien avec vous investisse tellement d'énergie pour contrer ce détective... J'essaie simplement de faire ce qui me parait juste.
De : Courtney Love À : David Perle Samedi 17 février 1996
Ouais, je veux qu'on fasse savoir tout ça. Je ne répondrai probablement pas beaucoup aux gens, mais j'aimerais que ça soit diffusé. Pourquoi quelqu'un consacre-t-il du temps à lutter contre Tom ? Ah... merci, ami de Courtney.
De : David Perle À : Courtney Love Samedi 17 février 1996
Aussi ridicule que cela puisse paraître, beaucoup de gens sont tombés dans le panneau de à Tom Grant. Pour ce qui me concerne, je ne vous respecte plus autant que par le passé, surtout après tous les ennuis que vous vous êtes attiré cette année, et qui ont vraiment diminué votre crédibilité. Même si je continue à vous aimer, je comprends que tant de gens puissent vous détester, et devenir des proies faciles pour Grant. Beaucoup d'entre eux pensent vraiment que vous êtes une meurtrière... Comme je l'ai déjà dit, je ne veux pas vous importuner avec des questions sur cette histoire. Je pense que presque tout ce que dit Grant est trafiqué.
De : Courtney Love À : David Perle Lundi19 février 1996
Voilà tout ce que je dirai aux gens : allez voir le médecin légiste, le chef de la police, le chef et le sergent de la Criminelle et vérifiez par vous-même où est la vérité. Grant avait une agence de détectives privés et il a eu beaucoup de chance : je ne pouvais trouver aucun avocat, alors je l'ai simplement pioché dans l'annuaire. C'est un homme d'affaires raté, lent et inepte. Les gens qu'il a recrutés à Seattle étaient également lents et inefficaces. Un exemple : j'avais demandé qu'une enquête soit menée chez les dealers. Demandez-lui donc si quelqu'un y est allé ? Non, personne. Ce type est un feignant. Dylan m'a dit qu'il a à peine regardé la maison, il n'est jamais allé dans la serre ou dans le garage, alors que je les lui avais mentionnés comme étant des cachettes probables de Kurt. Il n'y a rien à ajouter, les autorités sont au courant de tout. Au fait, la "note de Rome" est photocopiée et se trouve chez les forces spéciales de Police. Grant aurait voulu que je lui donne des photos, la copie de l'analyse balistique, et les rapports du service médico-légal. J'ai appelé Kimball et Cameron, tous deux m'ont dit que j'avais affaire à un illuminé. Un pareil trou du cul sera poursuivi par le diable jusqu'en enfer, et il le sait. C'est tout ce que j'ai à dire. Il y a une date prévue pour la révocation de sa licence, et personne ne publiera son "roman" plein de merde. Au revoir, Courtney.
De : David Perle À : Courtney Love Lundi 19 février 1996
Je n'arrête pas de répéter autour de moi que Grant n'ira jamais devant un tribunal, bienq u'ilprétende le réclamer. Il sait qu'il serait la cible des moqueries. D'aprés moi, ses médisances seraient balayée si les personnes impliquées (police, amis et familiers de Kurt) tenaient ensemble une conférence de presse au cours de laquelle ils clarifieraient la situation, et expliqueraient que tout ce que dit Grant est un amas de mensonges. Personnellement, j'ai mal au coeur chaque fois que j'entend mentionner Grant et son "enquête" dans les médias. Ce type obtient chaque jour un peu plus de crédit...
David
De : Courtney Love À : David Perle Lundi 19 février 1996
Ce type ne devrait pas avoir sa place dans les médias. S'il le faut, je vivrai dans une caravane le temps de gagner un procès en diffamation. Que se passerait-il si si j'allais chez Oprah, à la télévision, pour dire que Tom Cruise est homosexuel, sans avoir aucune preuve ? J'irais tout bonnement en prison pour au moins un an. La diffamation n'est pas protégée par le premier amendement. Ce type n'a rien, qu'une vieille Datsun, il vit dans le garage de son père. Dans six mois, il sera viré de sa propre agence. Je dois comparaître au tribunal à Los Angeles, pour lui faire retirer sa licence... Pourquoi devrions-nous tenir une conférence de presse pour contrer ce débile ? Je ne devrais même pas vous répondre à son sujet. Tout ce qu'i la, c'est internet.
Merci, Courtney.
De : David Perle À : Courtney Love Lundi 19 février 1996
À propos de la conférence de presse... Euh, j'ai juste dix-huit ans, que voulez-vous que je connaisse à ces foutues histoires ? Simplement, les supporters de Grant n'ont pas l'air d'étre très sensés, et je crois que le seul moyen pour qu'ils comprennent serait que des gens proches de Kurt leur disent : " Mecs, ce type est un menteur". J'espère que je ne vous énerve pas... ou que je ne me donne pas l'air plus important que je ne le mérite... Ce n'est sûrement pas le moyen idéal de rendre hommage à Cobain, mais chaque fois que je vois le nom de Grant, j'ai envie de vomir !
David.
De : Courtney Love À : David Perle Mercredi 28 février 1996
Les journalistes de High Times ont fumé trop de joints... Vous avez lu leur texte sur la "machine à rèves" ? Comme si Hank, mon père, pouvait posséder quoi que ce soit, une maison par exemple. Ce type vit au dépens de l'État, je n'ai jamais habité avec lui et je ne l'ai rencontré que dix fois dans ma vie. Il pense qu'à travers moi, il a inspiré Kurt : il est complétement mégalo... il se prend pour Kurt : le représentant d'une génération, alors qu'il n'est qu'un pathétique parasite, un petit voleur, maltraiteur d'enfant. Toutes les transcriptions de son procès avec ma mère pour ma garde sont publiques. Plusieurs témoins ont déclaré qu'il m'avait battue quand j'étais enfant, et m'a donné de la drogue en public. Ce n'est pas un détail très propre, mais tout le monde peut vérifier dans les archives du procès Risi contre Harrisson, en 1968. Ce type est un crétin fini, sa propre mère est venue à la barre pour l'accuser. Après ça, il n'a plus eu le droit de m'approcher pendant toute ma vie. Même les personnes condamnées pour inceste ont droit à des visites sous contrôle de temps à autre, alors vous pouvez imaginer à quel type vous avez affaire ! Lui et Tom Grant se ressemblent comme deux gouttes d'eau : inutiles et inutilisables. Mais ils ont touché le jackpot... c'est tellement débile...
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CHAPITRE 6
21/08/2006 09:21
EN LIGNE : TOM GRANT, DÉTECTIVE PRIVÉ ENGAGÉ PAR COURTNEY LOVE POUR RETROUVER KURT COBAIN
UN ACTE DE LÂCHETÉ
En raison des menaces des avocats de Courtney et des intimidations de puissants agents de l'industrie, les médias n'ont pas correctement couvert l'événement que constitue la mort de Kurt Cobain. Mais les tentatives de Courtney visant à faire le silence sur toute l'affaire ont échoué. La rumeur se répand grâce à Internet..
L'avocat de Courtney, un poltron silencieux et hypocrite, a fait enregistrer une plainte à mon encontre au Département de la Protection des Consommateurs à Sacramento, en Californie. C'est ce bureau qui accorde leurs licences aux détectives privés de Californie. Plutôt que de répondre aux rudes questions soulevées par mon enquête, les avocats de Courtney essayent sournoisement de faire suspendre ou révoquer ma licence, de manière à me mettre hors-jeu. La plainte enregistrée au nom de Courtney se fonde sur le fait que j'aurais violé un paragraphe du code du Commerce et du travail, en révélant des éléments de mon enquête au public. Le code établit qu'un détective privé ne peut donner d'informations sur une enquête à personne d'autre qu'aux représentants de la loi, du moins s'il n'a pas le consentement de son client. Voici quelques extraits de ma réponse :
Mlle Susan Just Case Management Branch Département de la Protection des Consommateurs 10220 Systems Parkway, Suite B, Sacramento, Californie 95827
Réf : Affaire n° IA 957769- PI Lic. n° 16603
Chère Mlle Just,
En réponse à la plainte enregistrée, j'ai expliqué ci-dessous les motifs de mes actes :
1. Immédiatement après que l'on a trouvé le corps de Kurt Cobain, ma cliente a communiqué mon numéro de téléphone à la presse. Elle ne m'a pas seulement donné la permission de parler aux journalistes, elle m'y a encouragé. Elle estimait apparemment que je me trouvais en position de m'exprimer valablement. Mes soupçons étaient tels qu'à ce moment-là, j'ai refusé. Je n'étais pas prêt à faire des déclarations publiques sur lesquelles j'aurais pu avoir à revenir plus tard. 2. Je crois que ma cliente m'a recruté pour de faux motifs, et qu'elle a, de ce simple fait, annulé le caractère légal de la relation client/enquêteur. 3. Le 8 mai 1994, un mois après la mort de Kurt Cobain, j'ai prévenu Mlle Love qu'elle n'était plus ma cliente, et qu'elle n'aurait plus de paiements à effectuer pour mes services. Cependant, Mlle Love a continué à louer mes services pour des cas qui n'avaient aucun rapport avec la mort de son mari, dans le but évident de rester informée de mes progrès dans l'enquête sur le meurtre. Je n'ai nullement l'intention de débattre publiquement de ces autres enquêtes. 4. J'ai essayé à plusieurs reprises de faire venir Mlle Love à mon bureau pour me rencontrer pendant qu'elle était à Los Angeles. Je l'ai prévenue que c'était extrêmement important. Je voulais évoquer avec elle mes soupçons et quelques-unes de mes conclusions. Je ne voulais pas envoyer une simple lettre, je sentais qu'il fallait que je m'entretienne avec elle directement. Mlle Love a promis de me rencontrer quelques semaines plus tard, mais bien qu'elle soit restée quelque jours à Los Angeles, à trois kilomètres de mon bureau, elle a "oublié" de venir me voir. 5. Quand j'ai commencé à penser à l'hypothèse d'un meurtre, je suis allé à la police comme l'exige la loi... sept jours après la mort de Kurt ! La police a choisi de ne pas accorder de crédit aux informations que je lui procurais, et a préféré ignorer les innombrables contradictions qui émaillent les dépositions de ma cliente. 6. J'ai notifié mes soupçons à ma cliente par écrit, et elle a, dès lors, commencé à saboter mon travail. 7. Deux personnes proches de Mlle Love sont mortes dans des circonstances suspectes 1 dans les deux mois qui ont suivi la mort de son mari. C'est une coïncidence trop étonnante pour que je puisse négliger ma propre sécurité. 8. Divulguer ces informations au public crée une atmosphère sécurisante pour moi et les personnes qui travaillent pour moi. 9. D'autres personnes sont en train de mourir. Des jeunes se suicident à cause des informations erronnées données par la presse, et de cette idée que quelqu'un qu'ils admiraient a choisi cette manière de résoudre ses problèmes. 10. La police de Seattle minimise délibérément l'importance d'informations indiquant que quelque chose n'est pas clair dans la mort de Cobain. Fondées sur les contradictions contenues dans les rapports d'inspecteurs coupables d'avoir bâclé leur travail, les informations communiquées à la presse et au public se sont révélées inexactes et déroutantes. Dans ces conditions, il serait stupide de ma part de continuer à fournir à la brigade de Seattle des preuves tangibles de ce que j'avance, pour les voir éliminées ou discréditées par elle. 11. Je ne me tairai pas à propos de ce que je crois être un meurtre, simplement parce que d'autres veulent fermer les yeux. Cette affaire doit être réexaminée par une agence gouvernementale indépendante. Si vous jugez que j'ai violé le code du Commerce et du Travail, et si vous suspendez ou révoquez ma licence, je ferai appel. Quoi qu'il en soit, les lois sont importantes : elles ne devraient pas être ignorées. Mais seul un fou s'arrête au feu rouge s'il sait qu'un camion lancé à pleine vitesse est sur le point de le percuter par l'arrière.
Sincèrement, Tom Grant
THE GRANT COMPAGNIE.
UNE DIVERSION TEMPORAIRE
Ils vont peut-être me retirer ma licence et je risque de me retrouver hors-jeu... temporairement. L'adresse du Département Californien de la Protection des Consommateurs est indiquée dans la lettre ci-dessus. Si vous voulez que je puisse poursuivre mon enquête, je vous invite à lui écrire et à exprimer votre opinion. J'ai été critiqué par certains pour avoir donné tous les détails de mon enquête sur Internet. Pourtant, si Courtney veut répondre, je serai heureux de mettre sur le réseau sa réponse complète. Courtney possède quelque chose que je n'ai pas... un accès immédiat aux médias. Elle a cultivé une foule d'amis journalistes disposés à biaiser leurs reportages en échange de l'interview d'une figure aussi controversée qu'elle. De surcroît, Courtney utilise de manière intensive les services on-line d'Internet, pour faire la promotion de son agenda. Elle en profite également pour dénigrer tous ceux qu'elle considère comme ses ennemis sur le réseau. Courtney semble estimer qu'elle seule a la droit de faire et de penser ce qu'elle veut. Pourtant pour ce qui concerne cette enquête, Courtney préfère se cacher. Ses avocats font tout ce qu'ils peuvent pour supprimer les informations contenues sur le réseau, plutôt que d'y répondre. Gardez en tête que le cabinet Codikow, Carroll et Regis est dans une situation délicate. Ils n'essayent pas seulement de calmer le jeu, ils essayent aussi de dissimuler dans cette enquête l'implication et la participation d'une amie proche de Courtney. L'une des associées de leur propre cabinet... Rosemary Carroll !
LA GAFFE DE KROQ
- Cinq minutes et c'est tout ! En janvier dernier, le producteur du Kevin and Bean Show, qui passe à l'antenne le matin sur 106.7 FM à Los Angeles, me demandait, par téléphone, une interview de cinq minutes. Cinq minutes ? ai-je pensé. Pas question ! C'est une station qui passe beaucoup de musique du groupe Hole. Ces deux garçons sont des comédiens. Il tournent tout en dérision, pourquoi me voulaient-ils seulement pour cinq minutes ? Devinant que j'avais été programmé pour recevoir une raclée, j'ai dit au producteur que je ferais une heure minimum, pas moins, et que je voulais rencontrer Kevin et Bean, le jour précédant l'émission, pour parler de ce dont j'aurais à débattre avec eux à l'antenne. - D'accord ! a-t-il dit...
On s'est retrouvés au studio pendant deux heures, la veille du passage à l'antenne. Kevin et Bean étaient tous les deux très amicaux et paraissaient être de mon côté, mais j'avais l'impression d'avoir été trompé. J'avais raison. Oublieux des décisions prises la veille, dix minutes après que l'émission eut commencé, ces gars ont commencé à m'agresser. Une heure et demie plus tard, nous étions encore sur le champ de bataille. Le standard était saturé. Kevin et Bean ont essayé de noyer les choses mais tout prenait feu. La majorité de ceux qui appelaient étaient favorables à mon enquête et voulaient en savoir davantage. Un avocat a appelé le studio, de sa voiture et a dit aux animateurs quelque chose comme "Vous n'écoutez pas, ce type sait ce qu'il fait !" et leur a donner ensuite une brève leçon de logique. Quand le temps est venu pour moi de partir, Kevin et Bean m'ont demandé si je souhaitais revenir la semaine suivante pour la suite de cette interview. - Bien sûr. Quand vous voudrez !
En écoutant la radio, tandis que je m'éloignais des des studios, j'ai entendu l'animateur promettre à ses auditeurs que je reviendrais bientôt. On avait voulu s'amuser de moi, mais le public de la radio m'avait considéré comme crédible.
Le lendemain, vers sept heures, j'allume la radio pour écouter le Kevin et Bean Show. Ce qui suit est une transcription de ce que j'ai entendu...
Bean : Ici le mondialement célèbre K-rock, 106.7 Kroq. Kevin et Bean. Il est 7 h 37. Nous devons nous occuper de quelque chose de pressant parce que nous avons eu euuh, je ne pense pas exagérer si je dis, que nous avons eu beaucoup d'appels téléphoniques ce matin...
Kevin : Aah, tu n'exagères pas du tout !
Bean : Des tas d'appels qui demandent une sorte de suite au show d'hier, dans lequel un détective privé s'est exprimé au sujet de la mort de Kurt Cobain... Nous sommes forcés à 100 % contre notre volonté à vous lire ceci : "Les représentants de Courtney Love ont fait objection au contenu du show d'hier soir. Par déférence pour Mlle Courtney Love, nous nous abstiendrons désormais de traiter de quelque sujet concernant Mlle Love. Merci de votre écoute et de votre compréhension."
Bien sûr, je n'ai pas été réinvité à intervenir sur cette radio, et les auditeurs qui ont téléphoné ont été priés de s'abstenir d'aborder ce sujet à l'antenne.
LE CANULAR DE LA "MACHINE À RÊVER"
Cette histoire bidon illustre bien la tactique de diversion utilisée par le clan de Courtney Love. Heureusement, presque tout le monde a immédiatement senti là-dedans une grossière escroquerie, un canular tellement lourd qu'il ne sert à rien d'en démentir les détails.
MA LICENCE
Le Département de la Protection des Consommateurs a encaissé mon chèque de cotisation bi-annuelle pour le effectuer le renouvellement de ma carte de détective privé. Je suppose que l'avocat de Courtney Love a fait marche arrière. J'espérais que nous allions enfin nous affronter devant un tribunal, mais le clan adverse s'est dégonflé !
EN LIGNE : TIM KENNEALY ET STEVE BLOOM, JOURNALISTES AU MAGAZINE HIGH TIMES
QUI A TUÉ KURT COBAIN ?
Deux ans après la mort de Kurt Cobain, un grand nombre de gens continuent de croire que le leader de Nirvana ne s'est pas suicidé, et que sa mort a été le résultat d'un acte criminel. C'est l'une des raisons pour lesquelles l'avocat de Love a enregistré une plainte au Département Californien de la Protection des Consommateurs, dans le but de faire suspendre la licence du détective privé Tom Grant. Celui-ci en a pourtant obtenu le renouvellement sans problème. "Ils font vraiment tout pour effrayer les gens, dit Grant. En fait, ils tirent des balles à blanc. Mais ils ne peuvent pas aller trop loin, car cela risquerait d'attirer l'attention sur cette affaire, et c'est exactement ce qu'ils veulent éviter." Grant maintient que sa démarche est bien étayée. Il continue à compiler les informations, espérant construire une argumentation suffisamment solide pour obliger la police de Seattle à rouvrir le dossier. "Les flics devront répondre à un tas de questions, dit-il. Mais ils ne le feront pas tant qu'ils ne subiront pas assez de pressions. Pour le moment nous sommes cantonnés au rôle d'observateurs."
UN TUEUR À GAGES
Quand on regarde jouer El Duce avec son groupe les Mentors, rois du porn-metal à Hollywood, certaines images viennent immédiatement à l'esprit. Le chanteur, trapu, torse nu, ânonne, en grognant, des histoires parlant de viols, de vengeances et de débauche. Il porte une cagoule noire de sa fabrication personnelle, et ressemble à un bourreau médiéval. Il ne lui manque qu'une hache. Cette allure d'exécuteur n'a apparemment pas échappé à Courtney Love, qui a rencontré El Duce, vers la fin des années 80, par l'intermédiaire du batteur du groupe Hole. D'après El Duce, Love s'est montrée au Rock Shop, un magasin de disques à Hollywood, au 1644 de l'avenue Wilcox, quelques jours avant le Nouvel An, aux environs de 20 h 30. Tandis que El Duce attendait un ami dehors, une limousine transportant Love s'est arrêtée devant le magasin. Love, à ce qu'il paraît, a alors fait une proposition qu'El Duce ne pouvait pas refuser : - El, j'ai vraiment besoin que tu me rendes un service. Mon vieux mari a été vraiment un gros con ces derniers temps. Je veux que tu lui fasse sauter sa putain de cervelle ! - Tu es sérieuse ? a demandé El Duce. - Ouais, je te donnerai cinquante mille dollars pour lui faire sauter sa putain de tête ! - OK, si tu es sérieuse ! "Je n'étais pas vraiment sûr qu'elle était sérieuse", dira plus tard El Duce. Elle a dit : - où est-ce que je peux te joindre ? A ce moment-là je n'avais pas de téléphone, mais je prenais mes messages dans un bar, c'est pourquoi j'ai répondu : - Tu peux me contacter au Rock Shop. Elle est rentrée dans le magasin, et le vendeur lui a donné une carte avec le numéro de téléphone.
Karush Sepedjian, qui dirige le Rock Shop, se rappelle la visite de Love en ces termes : - El était en train de s'exciter sur un banc devant le magasin, quand elle est arrivée. J'ai entendu des bribes de leur conversation. je l'ai entendue dire, "Est-ce que tu pourrais t'occuper de ça, est-ce que tu peux faire en sorte que ce soit fait ? Qu'est-ce que tu veux en échange ? Ils parlaient de casser la gueule à Kurt Cobain. Ensuite, El l'a emmenée à l'intérieur et m'a dit tranquillement : "Elle m'a offert cinquante mille billets." Elle a pris la carte que je lui tendais et m'a dit qu'elle me téléphonerait pour joindre El dans les mois qui suivaient."
En mars, Love téléphone au Rock Shop pour parler à El Duce. Sepedjian prend le combiné. Je lui ai dit : - Il n'est pas dans le coin, il est en tournée. Elle était comme soufflée et s'est mise à hurler : -Comment ? Quel fils de pute, nous avions un accord ! Elle jurait et ne cessait de répéter : - Qu'est-ce que je vais faire ? J'ai dit : - Je ne sais pas, j'ai un magasin à tenir, tu vois ? Alors salut !
Dix jours plus tard, on a trouvé le corps de Cobain. Ce jour-là, El Duce plaisante : - Je me demande si elle n'a pas payé un gogo pour lui faire sauter la tête ! Et Sepedjian insiste : - Peut-être a-t-elle trouvé quelqu'un d'autre. Je pense que Kurt se préparait à demander le divorce pour adultère, suppose El Duce. Il fallait qu'elle le fasse crever pour avoir l'argent.
Fréquemment accusés de misogynie, les puérils et sans complexes Mentors, El Duce, Dr. Heaten Scum et Sickie Wifebeater, enchantent leurs fidèles, et offensent tous les autres depuis 1977. Auteurs de chansons aussi controversées que Sur la Serviette Hygiènique, Gueule de Chaude-Pisse et Les Hétérosexuels ont le Droit de Faire du Rock, le groupe a atteint la notoriété dans les cercles de musique underground, grâce à ces concerts bizarres mettant en scène des danseuses de night-club et autres représentations sexuelles. Leur moment de gloire est arrivé en 1985, quand Tipper Gore a cité leur chanson Lavements Dorés lors d'une conférence au congrès du Centre de Documentation des Parents sur la Musique, dans le cadre de la campagne contre les paroles obscènes. Levez le nez et sentez mes vapeurs anales, a dit Tipper en citant El Duce, vos visages seront mon papier toilette. El Duce essaye peut-être seulement de spéculer sur la controverse de la mort de Cobain : Le nouveau groupe qu'il projette de créer s'appelle, comme par hasard, Courtney a tué Kurt.
HANK HARRISON : PAPA CHÉRI
Hank Harrison, le père de Courtney Love, n'est pas très respecté. Généralement décrit par les médias comme le "salaud de père de Love", il veut éclaircir certains points. "J'ai vécu avec Courtney du jour de sa naissance jusqu'à ce qu'elle ait six ans, les week-ends comme les autres jours, explique-t-il. Puis elle a été adoptée, mais sous ma tutelle. Je n'ai eu aucune nouvelle d'elle jusqu'à sa quinzième année, quand je l'ai sortie d'une maison de redressement. C'est alors qu'elle est venue vivre avec moi. Elle est restée sous ma responsabilité jusqu'à l'âge de dix-huit ans." Courtney avait été envoyée en maison de redressement pour vol à l'étalage. Harrison pense que c'est là qu'elle a pris une très mauvaise habitude. "La maison de redressement lui a enseigné à moucharder, dit-il. Il m'a fallu un certain temps pour comprendre qu'elle avait bénéficié de traitements de faveur en échange de ses dénonciations. Par la suite, elle m'a balancé plusieurs fois à la police car je détenais un peu d'herbe à la maison." Les propos de Love à l'égard de son père ne sont guère plus aimables. Elle affirme avoir été conçue lors d'un viol, et dit que son père lui donnait du LSD et la battait. "Je ne veux pas que cet homme s'approche de moi, jamais." raconte-t-elle au San Francisco Chronicle en mai dernier. Harrison, qui est allé au lycée de San Mateo avec Phil Lesh avant que celui-ci crée les Grateful Dead, a dirigé le groupe antérieurement, quand il se nommait encore Warlocks. Il a écrit deux livres à propos de ses expériences avec le groupe (The Dead Book et The Dead). "Il gagne sa vie comme parasite des Grateful Dead, dit Courtney à propos de son père dans le numéro de février de Playboy. Il arnaque tous ces imbéciles qui le vénèrent parce qu'ils croient qu'il est proche des Dead." "Phil Lesh a changé les couches de Courtney ! répond Harrison. Je me sens vraiment blessé. Bien sûr, que je vis des Dead. Il y a une demande pour ces livres. Qu'est-ce qu'elle veut que je fasse, que je ne les édite pas ? " En dehors des piques lancées contre son père, on a vu Courtney faire étalage de ses liens avec les Grateful Dead. L'article de Playboy définit Lesh comme son parrain (ce qui est vrai). Elle a par ailleurs souvent déclaré figurer au dos de l'album des Dead, Aoxomoxoa (ce qui est faux), et avoir assisté au concert de Woodstock, quand elle n'avait que cinq ans (ce qui est également faux). Le prochain livre d'Harrison, Au delà de Nirvana : L'Héritage de Kurt Cobain, ne va pas soulager la querelle entre le père et la fille. Dans cet ouvrage, le père de Courtney l'accuse de complicité dans la mort de son mari. "Elle a profité de sa mort d'une façon incroyable, dit-il. Je sais qu'en fait, il essayait de divorcer. Elle ne voulait pas en entendre parler. Il n'y a pas de doute dans mon esprit, Kurt Cobain a été tué." Harrison, qui n'a jamais rencontré son beau-fils et doit encore faire la connaissance de sa petite fille Frances Bean, a su que quelque chose n'allait pas à la minute même où il a appris la mort de Kurt Cobain. "J'ai soupçonné quelque chose de louche," dit-il. Richard Lee, qui anime sur une chaîne publique de télévision, à Seattle, une émission intitulée Kurt Cobain a été tué, a été le premier à parvenir à la conclusion que Cobain ne s'est pas suicidé. Harrison a lu l'opinion de Lee sur Internet, et l'a contacté. Lee ne détenait aucun élément de preuve substantiel, dit Harrison, mais quand j'ai déniché le détective privé Tom Grant, je me suis dit, "Qu'est-ce que je me sens bien !" D'un seul coup, je ne me trouvais plus psychotique. Je n'étais plus seul en train d'imaginer ces choses. Je n'étais pas le seul type au monde à penser que quelque chose d'étrange était arrivé. Quant à Grant, le détective, il n'arrivait pas à croire que le propre père de Courtney serait de son côté." Quelles preuves Harrison possède-t-il de l'implication de Courtney dans la mort de Cobain ? "Courtney a un côté obscur, dit-il, et elle peut se montrer terriblement violente. Elle a essayé de me tuer deux fois, et s'est fait virer de tous les groupes avec lesquels elle a joué, précisément en raison de sa violence. Elle peut être vraiment diabolique, vraiment, vraiment sombre et sinistre, au-delà de ce que vous pouvez imaginer. C'est quand je l'ai récupérée que j'ai découvert combien elle était détraquée."
Née le 9 juillet 1964 à San Francisco, Courtney Love est revenue vivre avec son père en 1979, quand celui-ci a obtenu sa garde. Harrison devenu entre-temps rédacteur technique chez Lockeed, avait fondé sa propre société de publication, The Archives Press. Il vivait sur un bateau à Sausalito en Californie. "Elle était vraiment impressionnée par ce style vie un peu bohème, se rappelle-t-il. Beaucoup d'art, beaucoup de livres ! Elle était cool, mais elle n'avait que quinze ans. En grandissant, et à mesure qu'elle s'émancipait, elle a commencé à me regarder comme quelqu'un qui finalement n'a pas si bien réussi que ça. Elle voulait un père plus influent, quelqu'un qui aurait pu l'aider dans ses ambitions fantaisistes de showbiz." "Quand elle était petite, vraiment toute petite, elle voulait devenir une grande vedette. Je connais beaucoup de filles qui disent qu'elles veulent devenir des stars de cinéma, mais elle, elle le pensait vraiment." En 1980, Courtney déménage pour aller en Irlande avec son père qui prend deux années sabbatiques. "Elle a vécu avec moi pendant cinq mois, jusqu'à la fonte des neiges. Aussitôt que le printemps est arrivé, elle est allée à Liverpool. Elle était folle des garçons. Elle dansait avec des mecs, montait des arnaques. À chaque fois que je la voyais elle était bourrée de fric. C'était sa période new-wave. Elle jouait les groupies de gens tels que Julian Cope et les Echo and The Bunnymen."
Harrison revient à Bay Area en 1982, suivi de près par Courtney. Lui et sa concubine, Katrina, ont acheté une maison de style victorien dans Menlo Park, au sud de la ville. "Nous étions son point d'ancrage, dit-il. Elle déambulait, allant de piaule en piaule, de concert punk en concert punk, de camé en camé. Elle vivait dans les cuves de la brasserie Hamm désaffectée. Les gens avaient l'habitude de descendre dans les cuves et de se soûler avec les vapeurs. Elle est a été un "rat des cuves" pendant un moment." Pionnier de la révolution informatique, Harrison devient l'éditeur du Doctor Dobb's Journal, et obtient un poste à Info World et à Plus Magazine. Ces réussites n'impressionnent guère Courtney. Celle-ci a décoré sa chambre victorienne avec des douzaines de chandelles allumées, de dentelles et de poupées, et regarde des films tels que Frances, Birdy et Pretty in Pink.. "Elle a vu l'histoire de Frances Farmer trente-deux fois, dit Harrison. Cela m'a inquiété. J'ai réalisé à quel point Courtney était profondément troublée." Courtney va alors passer ses week-ends à San Francisco. Une fois, elle en revient "tellement défoncée qu'on a dû s'asseoir sur elle et lui donner du Valium," dit son père, qui sait comment faire "redescendre" ceux qui ont de mauvais trips sous acide. Son diagnostic est que Courtney avait pris un mélange d'héroïne et de fentanyl. "C'était vraiment grave. Elle me hurlait dessus et délirait complètement. Elle était psychosée."
Le temps passe. Courtney a eu vingt ans en 1984, et s'est liée d'amitié avec Jennifer Finch (L7) et Kat Bjelland (Babes in Toyland), des musiciens de Portland, dans l'Oregon. Ensemble, ils ont formé Sugar Baby Doll, avant de se fragmenter en trois groupes différents. Elle a fait des tournées à travers le pays, de Portland à Minneapolis, de Los Angeles à San Francisco. A Los Angeles, Courtney infiltre le milieu punk-rock : elle joue dans deux films d'Alex Cox, Sid et Nancy et Straight to Hell puis se marie avec l'animateur de Leaving Train, Falling James Morland. Ils vivent ensemble pendant huit mois, et se séparent le lendemain de leur mariage, en 1989. "Je crois que le principal problème, c'est que j'étais chez SST Records, déclare Morland dans le magazine Nerve en 1993. Elle pensait que c'était une maison de disques trop petite pour son mari. Ce n'était pas très punk-rock de sa part, n'est-ce pas ?"
Harrison perd le contact avec sa fille unique en 1987. La brouille, d'après lui, se fonde sur une histoire d'héroïne. "Elle m'a téléphoné le jour de son anniversaire pour réclamer de l'argent, dit-il. J'ai dit pourquoi ne fais-tu pas un saut jusqu'ici ? Je te donne un billet, on s'asseoit, et on bavarde ; si tu préfères, je fais un saut chez toi et je t'apporte un peu d'argent. Elle a dit qu'elle avait besoin que je lui envoie l'argent tout de suite. Elle était abrutie par la drogue. Je lui ai dit que l'héroïne n'était pas mon truc et que je ne voulait pas l'aider à s'en acheter. Elle a juré qu'elle ne me parlerait plus jamais et qu'elle me tuerait."
Durant les six années qui suivent, période pendant laquelle Courtney crée son propre groupe, Hole, rencontre Kurt Cobain, se marie avec lui, et donne naissance à leur fille, Harrison se tient en dehors du tableau. Il ne sait de sa fille que ce qu'il lit dans les magazines. Finalement, il revoit Courtney fin 1993 à San Francisco, lors d'un concert où se produisent les Lemonheads, Fugazi, et Hole. Harrison se souvient : "J'ai téléphoné d'abord pour être sûr que c'était OK. Elle était contente de me voir, elle m'a serré bien fort dans ses bras. Elle voulait que je ne parle à personne, juste que je m'assoie, me taise et écoute le concert. J'ai pris une vodka et j'ai asssité au spectacle. J'étais impressionné par le groupe. J'étais complètement soufflé, vraiment. Le jour suivant, je l'ai rencontrée à l'hôtel. Courtney avait, et ça j'en suis absolument sûr parce que je l'ai vu de mes yeux, une liaison avec Evan Dando. Lui et Courtney dormaient dans le même lit. J'ai pensé que Kurt était très libéral ! Dando est venu à moi et m'a serré la main. Il avait lu l'un de mes livres. Ensuite, pendant que nous étions dans la chambre, elle a téléphoné à Kurt. Elle a demandé à parler à M. Poupon. C'est comme ça que j'ai appris son surnom intime. Je ne l'avais jamais rencontré, mais j'étais dans la pièce pendant qu'elle lui parlait. C'est la fois où je me suis senti le plus proche de Kurt." À la fin de son séjour, Harrison demande à Courtney s'il peut venir à Seattle et voir le bébé pour Noël. "Elle m'a donné deux adresses et deux numéros de téléphone qui se sont révélés faux. La seule raison pour laquelle elle est venue me trouver c'est qu'elle voulait que ses gardes du corps sachent qui j'étais, pour pouvoir s'occuper de moi à une date future. Elle est beaucoup plus subtile que moi. Je n'ai qu'aux alentours de 130 de Quotient Intellectuel, et une mémoire photographique, mais je ne suis qu'une sorte de hippie camé. Je n'ai pas l'esprit fourbe, ou un mauvais karma. Mais elle, elle est absolument et foutrement intelligente. Comme un chirurgien ou quelque chose de ce genre. Elle pense sur six ou sept niveaux à la fois, comme sa mère."
Par la suite Hank Harrison n'a plus de contacts avec sa fille. Mais il est persuadé que c'est elle qui le harcèle de menaces, d'appels téléphoniques interrompus dès qu'il décroche le combiné, et d'étranges silences au téléphone. En octobre dernier, deux hommes essayent de l'agresser. "Un des types a mis ses mains sur moi et a commencé à me bousculer, dit-il. J'ai laissé les chiens sortir de la voiture, ils les ont chassés et se sont enfuis. Je ne sais pas si cela a quelque chose à voir avec Courtney ou pas, mais j'ai entendu dire que ma fille a passé un contrat sur moi." Divagations d'un paranoïaque ou pressentiments morbides d'un chercheur de vérité ? Nul ne le sait... "Je n'essaye pas de faire mettre ma fille en prison, explique Harrison. C'est juste que je me suis trouvé au centre d'un tissu d'événements étranges, qui ont affecté ma vie. C'est tout à fait comme si votre enfant rentrait à la maison avec les plans de la bombe atomique dans son cartable, et que vous vous demandiez : putain, où est-ce qu'il les a eus ? Ma fille est rentrée à la maison avec un mari mort et je veux savoir ce qui s'est passé, merde !"
LA MACHINE À RÊVER
Aucun auteur américain vivant n'a plus influencé les paroles des chansons dans l'univers du rock'n'roll que William Burroughs. Certains ont affirmé que le grand écrivain avait eu une influence sur la mort de Cobain.
Ces charges sont fondées sur le fait que, dans les derniers mois de sa vie, Kurt Cobain a acquis un engin appelé la Machine à Rêver, qui a été créé par l'ami et collaborateur de Burroughs, Brion Gysin. C'est Burroughs qui a rendu populaire la Machine à Rêver. La machine a été, affirment certains, l'instrument de la mort tragique de Kurt. Aujourd'hui, Courtney Love mesure la part de responsabilité de la Machine à Rêver : "Si Kurt, dit-elle, n'était pas rentré en contact avec les fabricants, il serait encore avec nous." La Machine à Rêver consiste en un cylindre en carton percé de trous, relié à une platine de tourne-disques réglée sur la vitesse maximum. Au centre se trouve un globe lumineux de 100 watts. Quand on met en route la machine, le cylindre se met à tourner à 78 tours par minute. Les sujets s'assoient devant le cylindre et ferment les yeux. Les éclats de lumière qui passent à travers les trous viennent frapper les yeux. Si la personne est réceptive, l'effet peut aller très loin, surtout si l'on a pris un peu d'herbe et de rock bien chauds. Cela peut créer une sensation onirique, une migraine ou même une crise d'épilepsie. Burroughs a dit une fois, à propos de la Machine à Rêver : "Les sujets disent voir des lumières éblouissantes, des couleurs et une brillance surnaturelles... des constructions géométriques élaborées et inextricables, surgies de mosaïques multidimensionnelles, de véritables boules de feu qui s'organisent en scènes puissamment dramatiques ou en rêves brillamment colorés." Selon le Journal de la culture de la Côte Ouest, à San Francisco, Kurt aurait utilisé la machine une fois, pendant soixante-douze heures d'affilée. Nous avons localisé David Woodard, l'homme d'affaires de San Francisco, qui fabrique et vend des répliques de la machine de Gysin et Burroughs pour cent quarante-cinq dollars. Dans une interview menée par Victor Bockris pour High Times, Woodard raconte que Cobain lui a téléphoné plus d'une vingtaine de fois en l'espace de six mois de 1993 à 1994, pour parler de sa vie et de la Machine à Rêver. "J'ai senti qu'il l'utilisait pendant de longues périodes, mais soixante-douze heures ? C'est ridicule." Woordard a rencontré Cobain lors d'une soirée à Seattle, durant l'été 1993. Il préfère ne pas donner de détails sur les conditions dans lesquelles Kurt a acheté la machine. Woodard admet que la Machine à Rêver a pu rendre plus complexes les problèmes de Cobain. "Si c'est le cas, dit-il, la machine l'a aidé a voir qu'il commençait à perdre sa gloire en tant que figure culturelle. Il s'est senti comme un Andy Wharol, un Richard Wagner et un Lucifer réunis en une seule personne. Sa situation très particulière l'incitait sans cesse au suicide." "J'ai imaginé, poursuit Woodward, que le suicide lui a été évoqué par cette petite voix intérieure que la Machine à Rêver rend audible. Oui la Machine a sans doute joué un rôle." Après le récit de Woodward, on croit voir Kurt Cobain dans une Machine à Rêver géante, en pleine transe, son corps passant à toute vitesse de la scintillante ligne d'horizon de Manhattan aux panoramas des neiges éternelles de l'Himalaya. Ses yeux turquoise sont grand ouverts. Il plane au dessus des nuages. Soudainement, il explose dans le bleu profond de l'espace.
La controverse à propos de l'effet produit sur Kurt par la Machine à Rêver est peut-être un écran de fumée qu'élèvent ceux qui veulent nous faire croire au suicide. Tom Grant qualifie cette histoire de "manoeuvre de diversion".
EN LIGNE : UN USAGER D'INTERNET
Cher M. Grant,
Je suis récemment arrivé sur Internet, et je déambulais hier à la recherche de services consacrés à Nirvana quand j'ai trouvé votre rapport d'enquête. J'ai pensé que vous étiez juste un illuminé essayant d'avoir ses quinze minutes de gloire. Maintenant que j'en sais davantage sur cette affaire, je crois que je me trompais. Vous cherchez vraiment à connaître les raisons de la mort de Kurt. Je voulais juste vous faire savoir que moi, ainsi que bien d'autres gens que la mort de Kurt a blessés jusqu'à l'âme, nous vous soutenons à 100 %... J'ai lutté contre la dépression et l'aliénation toute ma vie. Nirvana était comme un radeau pour moi. Je savais que quelqu'un, quelque part, était passé par les mêmes tourments, et avait gagné sa bataille. Mais après la mort de Kurt, j'ai pensé sérieusement au suicide pendant un moment. Il semblait être le type le plus obstiné du monde : si le monde avait fini par vaincre quelqu'un d'aussi talentueux, quelle chance avais-je de m'en sortir ? Maintenant je sais, comme je l'avais toujours senti, qu'il n'a pas laissé tomber. Le monde était simplement trop impatient de le cataloguer juste comme un nouveau connard de camé qui s'est foutu en l'air. Cela convient parfaitement au scénario. Il est évident que la police de Seattle l'a fait, les médias l'ont fait, la société, d'une manière générale, l'a fait. Ils ont cru ce qu'ils ont voulu croire. Quant à Courtney, elle n'était rien avant Kurt et elle savait qu'elle ne serait plus rien sans lui. Son refus de laisser l'âme de Kurt en paix montre que sa carrière compte plus que son deuil.
Je suis désolé si cette lettre est un peu longue et incohérente, mais je voulais juste vous faire savoir comment je me sens, et d'autres avec moi. J'espère que les forces qui essayent de vous abattre n'y parviendront pas.
Bonne chance, G. C.
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